À Pierre Cauvet.

[4 décembre 1850.]

Espérez, mon pauvre poëte, le désespoir n’est pas d’un cœur qui croit ni d’un esprit qui pense ; et puis, d’ailleurs, qu’est-ce qui vous alarme ? Aucun de ceux qui vous connaissent, et qui savent tout ce qu’il y a de noble et d’élevé en vous, n’a pu vous croire coupable. Quant aux juges, je suis convaincu qu’il y aura une ordonnance de non-lieu. J’ai vu deux fois votre malheureuse femme, et tout ce qu’elle m’a dit me prouve que l’accusation tombera d’elle-même.

Hélas ! nous autres hommes de l’opposition, nous sommes de bien mauvaises recommandations à cette heure ; pourtant, je trouverai moyen de faire savoir à votre juge d’instruction tout ce que je pense et tout ce que je sais de vous.

Allons, courage ; relevez la tête, puisque vous êtes innocent, et relevez votre âme puisque vous êtes chrétien.

Je vous serre la main.

Victor Hugo.

Brofferio, avocat et député au Parlement de Turin, devint le chef de l’opposition démocratique et fonda plusieurs journaux. Il joua un rôle très actif dans la politique de son pays et, défendant les mêmes idées que celles de Victor Hugo, il échangea avec lui, de 1850 à 1865, une correspondance d’un grand intérêt. L’Évènement, 17 février 1850. Reproduit dans Actes et Paroles, Avant l’exil. Historique. Édition de l’Imprimerie Nationale. Inédite. Feuilleton de L’Événement (18 mars 1850) sur le drame Notre-Dame de Paris, tiré par Paul Foucher du roman de Victor Hugo. Bibliothèque Nationale. Jean Pierre Barbier. Juliette Drouet, sa vie, son œuvre. Inédite. — La colonie de Petit-Bourg adoptait les enfants pauvres, les orphelins et les enfants trouvés de Paris ; après la révolution de Février 1848, elle recueillit aussi les jeunes détenus au-dessous de 16 ans « acquittés comme ayant agi sans discernement ». En décembre 1848, Victor Hugo avait sollicité pour Petit-Bourg le patronage du président de la République, mais en 1850, passé définitivement dans les rangs de l’opposition, il craignit pour la colonie la suppression de la subvention du gouvernement. Brouillon. Archives de la famille de Victor Hugo. Inédite. — Charles Edmond, pseudonyme de Chojecky, sujet polonais ; homme de lettres, il collabora à des journaux d’opinion très avancée ; en 1849 il publia une brochure : Les révolutionnaires et les partis rétrogrades en 1848. Compromis dans un procès de presse, il se rendit en Égypte, puis en Suisse. Quand il revint en France, en 1850, un décret expulsa les Polonais. C’est alors qu’il reçut de Victor Hugo cette lettre. Il laissa plusieurs comédies et drames et quelques études historiques. Collection Jules Claretie. Inédite. Robert Peel, membre de la Chambre des Communes, très populaire en Angleterre. François-Victor était, avec son frère Charles, l’un des cinq fondateurs du journal L’Événement ; les trois autres étaient Paul Meurice, Auguste Vacquerie et Camille Erdan ; le premier numéro parut le 1er août 1848. Lord Palmerston, adversaire de la politique de Robert Peel, connut de grands succès à la Chambre des Communes. Bibliothèque Nationale. Alfred de Musset, Théophile Gautier, Sainte-Beuve. Alfred de Musset fut présenté à Victor Hugo par Paul Foucher, son camarade au collège Henri IV ; il lut ses premiers vers rue Notre-Dame-des-Champs et fut tout de suite apprécié et encouragé ; dès 1828 Musset écrit déjà à Victor Hugo : mon cher ami ; il y eut pourtant un nuage qui disparut bientôt, car lorsque Musset brigua les suffrages de l’Académie, sept fois le vote de Victor Hugo lui fut acquis ; la lettre du 17 août 1850 montre en quelle estime le chef de l’école romantique tenait le poète des Nuits. L’Évènement, 18 août 1850. Inédite. Bibliothèque Nationale. Inédite. — Ziegler, peintre de talent, eut des tableaux acquis par différents musées de France. Il fonda, près de Beauvais, une poterie qui porte son nom. Copie de M me Drouet. Communiquée par M. Cornuau. Ponsard se destinait au barreau, mais une traduction de Manfred, écrite en 1837, le poussa à aborder le théâtre. Sa première tragédie, Lucrèce (1843), eut d’autant plus de succès qu’elle servait, par le retour au style noble et au « bon sens », les rancunes des classiques contre le romantisme ; venant après L’échec des Burgraves, on espérait que le triomphe de Lucrèce avait à tout jamais enterré le théâtre de Victor Hugo : on joue toujours Hernani et Ruy Blas et ceux qui ont vu jouer ou lu Lucrèce sont bien rares. Les pièces de Ponsard ne réussirent qu’à moitié ; il faut en excepter L’Honneur et l’Argent et Le Lion amoureux qui restèrent assez longtemps au répertoire. Charlotte Corday, drame représenté le 23 mars 1850, fut reprise au Théâtre-Français en 1902. Le Gaulois, 24 février 1902. Pierre Cauvet, accusé à tort de vol au Mont-de-Piété où il était employé ; reconnu innocent, il publia dans L’Évènement, 10 mai 1851, la lettre de Victor Hugo.

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