À David d’Angers.

Marine-Terrace, 16 avril 1854.

Cher grand David, j’ai reçu votre bonne et noble lettre, avec la page si intéressante qu’elle contenait. Je suis heureux que ce livre ait été à votre cœur. Cher ami, enviez-moi, enviez-moi tous ; ma proscription est bonne, et j’en remercie la destinée. En ces temps-ci, je ne sais pas si proscription est souffrance, mais je sais que proscription est honneur. Ô mon sculpteur, un jour vous m’avez mis une couronne sur la tête, et je vous ai dit : Pourquoi ? — Vous deviniez la proscription.

À ce propos, ce chef-d’œuvre, je vous le remets et vous le confie. Je n’ai plus de chez moi, le buste est chassé comme l’homme. Ouvrez-lui votre porte. J’espère qu’un de ces jours, bientôt peut-être, j’irai le chercher chez vous. En attendant gardez-le-moi. Gardez-moi aussi votre vaillante et généreuse amitié.

Je vous serre la main, poëte du marbre.

Victor Hugo.

Mettez-moi aux pieds de votre courageuse et charmante femme. Ma femme et ma fille l’embrassent.

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