À M. Coppens.

Marine-Terrace, 26 mars [1854].

Vous avez raison, cher et honorable co-proscrit ; on n’oublie pas les grandes luttes qu’on a traversées ensemble ; votre souvenir est mêlé pour moi à ces sombres et mémorables heures de décembre ; aussi quand il me vient de vous un serrement de main, j’en suis heureux.

Nous avons en effet la pensée d’aller quelqu’un de ces jours chercher le midi, si le midi ne nous est pas interdit. Proscrits et pestiférés que nous sommes, les gouvernements n’osent nous accueillir sans la permission du maître brigand des Tuileries ; l’horizon, ouvert à tous, est fermé pour nous, et M. Bonaparte en a les clefs à sa ceinture.

Si donc le Portugal ou l’Espagne n’ont pas trop peur de moi, je compte y aller regarder d’un peu moins loin le soleil. Dans tous les cas, ce ne serait pas, je suppose, avant l’automne. Vous voyez que si vous aviez la bonne pensée de venir voir Jersey, vous nous y trouveriez encore tout l’été. Ce serait une vraie joie pour nous.

Mettez-moi aux pieds de madame Coppens, et croyez-moi bien cordialement à vous.

Victor Hugo.

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