Hauteville-House, 29 avril 1860.
Vous m’avez envoyé, cher poëte, une bien belle page ; je suis tout heureux et très fier de ce que vous voulez bien penser des choses que j’appelle mes dessins à la plume. J’ai fini par y mêler du crayon, du fusain, de la sépia, du charbon, de la suie et toutes sortes de mixtures bizarres qui arrivent à rendre à peu près ce que j’ai dans l’œil et surtout dans l’esprit. Cela m’amuse entre deux strophes.
Puisque vous connaissez M. Méryon, dites-lui que ses splendides eaux-fortes m’ont ébloui. Sans la couleur, rien qu’avec l’ombre et la lumière, le clair-obscur tout seul et livré à lui-même, voilà le problème de l’eau-forte. M. Méryon le résout magistralement. Ce qu’il fait est superbe. Ses planches vivent, rayonnent et pensent. Il est digne de la page profonde et lumineuse qu’il vous a inspirée.
Vous avez en vous, cher penseur, toutes les cordes de l’art ; vous démontrez une fois de plus cette loi, que, dans un artiste, le critique est toujours égal au poëte. Vous expliquez comme vous peignez, granditer.