À George Sand.

Hauteville-House, 28 novembre 1865.

Vous venez de m’écrire, dans L’Avenir National, une admirable lettre. Cette page me paye mon livre. Vous êtes un des plus grands esprits de la France et du monde, et, ce qu’il y a de plus beau dans le monde, un esprit fait de cœur. C’est le cœur, le cœur profond, qui parle, dans tout ce que vous dites , urbi et orbi. Ayant en vous toutes les tendresses, vous avez le droit de promulguer toutes les vérités. C’est une sublime et douce chose de voir reparaître, dans nos siècles de doute et de lutte, sous la magnifique figure de George Sand, la femme prêtresse. Votre pensée est, à ses heures, héroïque, parce qu’elle est bonne. De là votre puissance. Ce que vous dites de la vie, de la mort, du tombeau, de l’immense gamme des âmes sur la lyre de l’infini, des ascensions sans fin, des transfigurations sans nuit, tout cela, que vous faites voir et que vous faites penser, est vrai et pur, magnanime à dire, nécessaire à entendre. Quelques esprits, en ce siècle, font tapage par la négation ; c’est aux grandes âmes qu’est réservée l’affirmation. Vous avez le droit au oui. Usez-en. Usez-en pour vous et pour tous. Dieu a, au milieu des hommes, une preuve, le génie. Vous êtes, donc il est. Je considère une page affirmante comme un service rendu au genre humain, et quand cette page est écrite par vous, elle a une lumière double, la gloire s’ajoutant à la vérité.

Vous êtes triste, ô consolatrice. Ceci augmente votre grandeur. Laissez-moi vous dire que je suis profondément ému.

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