À Théodore de Banville.

Bruxelles, 27 juin [1866].

Mon poëte, vous avez un grand succès. Comme on sait que j’aime les bonnes nouvelles, c’est la première chose qu’on me dit au débotté. J’arrive, je quitte momentanément Guernesey pour Bruxelles, de Celte je deviens Welche, c’est un progrès ; les Welches sont plus libres penseurs que les Celtes, et ici je suis plus près de la France. Me voilà donc en Belgique pour trois mois. Après quoi, je reprendrai mon vol vers mon écueil en pleine mer. Vous verrai-je ? ce serait une grande joie. — En attendant, je vous applaudis. Votre Pierre Gringoire a, je le sais, tout ce qui fait l’œuvre accomplie. Vous avez, c’est-à-dire, nous avons, une comédie de plus. Le grand persécuté de notre époque, l’idéal, est le bienvenu chez vous. Vous êtes le poëte doublé de l’artiste. Bravo donc à votre style, à votre verve, à votre grâce, à votre philosophie masquée de fantaisie et de gaîté ! Je suis heureux de votre triomphe ; je n’en suis pas jaloux. Que voulez-vous ? je suis une ganache, je ne suis plus de mon temps, j’ai toujours cette vieille faiblesse d’aimer mes amis.

Notre bon et charmant Méry est donc mort ! — Je ne consens pas à

désespérer de Baudelaire. Qui sait ? Flamma tenax.

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