À Charles.

H.-H., 22 mai.

Tu m’as écrit, mon Charles, une lettre magnifique. Au reste tu n’en fais pas d’autres. Ton deuxième article (les trois serments) est une trouvaille. L’intercalation de l’anecdote touchante dans cette imprécation vengeresse émeut, et fait brusquement venir l’attendrissement à travers la colère. Tu avais un effet du même genre, très rare et très saisissant, dans ta visite à Barbès. Je sais par ce qu’on m’écrit que tes articles font une très grande sensation à Paris. Continue. Mais sois prudent. Un mot de trop, et tu serais forcé d’opter entre la prison et l’exil. Si tu optais pour Hauteville-House, j’aurais l’égoïsme féroce de n’en pas être désolé.

Oui, ta lettre sur l’Homme qui Rit est tout un article, quel dommage que cela ne soit pas imprimé ! C’est de la haute critique pénétrante, chose si rare aujourd’hui. Tu entres dans la peau des personnages et tu éclaires admirablement la nuit des uns et la caverne des autres. C’est une bien belle page, et j’y sens ta douce et profonde tendresse.

J’attends ta lettre d’avis. N’oublie pas qu’il faut au moins huit jours d’avance pour préparer votre installation.

J’écris ceci à M. G. Frédérix. Lisez la lettre, mettez-la sous enveloppe avec cachet noir, et envoyez-la lui le plus tôt et le plus sûrement possible. — Je vous serre tous étroitement dans mes bras.

V.

Autre commission. Je prie ma chère Alice d’envoyer cette lettre à votre cousine Mme Léopold Hugo dont j’ignore l’adresse. Je pense que vous la savez.

5 h, du soir. J’ouvre le Rappel qui m’arrive. Bravo au deuxième article de Victor ! Meurice m’écrit que le Rappel tire à 50 000. C’est un énorme succès.

Mme Drouet, qui est la poëte-lauréate de notre doux Georges, a fait ce couplet sur sa prochaine venue, air de la Carmagnole :

Le petit George avait promis (bis)

De venir voir ses bons amis (bis)

Il vient à Guernesey
Pour se faire baisè !

Barbès a-t-il reçu ma lettre et l’Homme qui Rit ?

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