À Auguste Vacquerie.

H.-H., 28 avril.

Vous m’écrivez, cher Auguste, des paroles émues qui me charment. Rendre témoignage à votre grand et puissant esprit est une joie pour moi. Vous pouvez vous appliquer aussi ce que je dis des incontestés qui décroissent et des contestés qui grandissent ; votre place, déjà haute dans le présent, sera grâce à vos ennemis (qui d’ailleurs sont les miens) plus haute encore dans l’avenir. Vous le savez bien. De là votre calme. De là aussi le mien.

L’Avenir du 25 février a publié un article très hostile au livre Lacroix, et à moi en passant. (On m’y dit aigrement ce qu’aurait fait Voltaire à ma place, etc.) Signé P. Vernier. C’est à cela que je faisais allusion. Parlez-en, ou n’en parlez pas, à M. Peyrat. C’est à cette heure oublié et indifférent. Je suis charmé qu’il soit resté mon ami. Je compte sur lui en ce moment, dites-le lui, car notre Déclaration de Paix est un intérêt démocratique, et dépasse même les proportions d’un parti. Personne ne sent cela mieux que vous. À propos de Hernani, que dites-vous de cette persistance des journaux bien informés à dire et à répéter qu’on ne jouera que Hernani, et point du tout Ruy Blas, ni rien à aucun autre théâtre ? On ferait, avec plus ou moins de police, tomber Hernani, on dirait que le public ne veut plus de cette littérature, et le tour serait joué. Si cela était certain, ne vaudrait-il pas mieux que je fisse, moi, de la reprise ultérieure de mes pièces (sans hâte, mais certaine) une condition à la reprise d’Hernani ? Sino, no. Qu’en pensez-vous ? J’ai prié Meurice d’en causer avec vous. Votre avis fera loi pour moi. Remerciez de ma part l’excellent et robuste peintre Bracquemond. C’est là un talent que j’aime. — Voulez-vous être assez bon pour transmettre ce mot cordial à M. E. Thierry. — Il faut, certes, que M. Bellier ait sa loge. Voulez-vous lui dire que j’ai reçu de lui quatre vers charmants (sans son adresse, et sans le livre que ces vers annonçaient). M. Bellier est un de mes plus sympathiques souvenirs. M. Philibert Audebrand ne demande pour lui qu’une place ; la seconde est pour M. Jules Lermina, à qui vous avez donné une stalle pour le Fils, et qui a raconté dans le Soleil ses applaudissements. Je vous les recommande donc toutes deux. J’écrirai à Bruxelles. J’écrirai à Frond. Je mets mon Introduction sous votre protection. Sub alis tuis. Ce qu’on dit aux séraphins, on peut le dire aux aigles.

À vous ex intimo.

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