À Madame Victor Hugo.

H.-H., jeudi 14 mars.

Chère amie, te voilà à bon port, et entourée de tous les bras et de tous les cœurs que je voudrais autour de moi. Je vous envie tous, mes bien-aimés. J’espère que le petit bonhomme vit déjà ; et qu’à l’heure où je suis, le Hugo en herbe tette vigoureusement sa maman. Sur ce, j’embrasse Alice. — Je garderai le silence sur les très curieux renseignements relatifs à Hernani. Auguste m’a écrit. Je lui réponds. Voici, je crois, la solution : — Oui, je consentirai à la reprise de mes pièces à la condition qu’elles ne subiront pas un nouvel examen de censure, que pas un vers n’en sera retranché par le gouvernement actuel, et qu’aucune revision spéciale de la police théâtrale d’à présent n’aura lieu. — Ceci est de ma dignité, et si le gouvernement refuse, je garde le bon côté, et le terrain me reste. Vous serez, je n’en doute pas, de mon avis.

Pour Victor.

M. Lacroix m’étonne. Il ne m’a pas répondu, et ne me répond pas. J’attends à chaque courrier une lettre de lui qui ne vient pas. Quelle idée a-t-il de perdre ainsi le temps ? Ajourne-t-il la publication de son livre Paris ? Parle-lui, mon Victor, et confesse ce sphinx. Je n’ai rien compris à la proposition que tu m’as transmise de sa part. Qu’il veuille bien m’écrire lui-même. Il continue de m’envoyer des bonnes feuilles, et non des épreuves, c’est-à-dire de l’irréparable. Je ne comprends rien à ce jeu bizarre. Lis-lui, je te prie, ma lettre. Elle le décidera peut-être à m’écrire.

Je vous serre tous dans mes bras, chers aimés.

Le dépôt du manuscrit dans tes mains et dans celles de Charles serait excellent, mais je ne puis songer à rien envoyer tant que M. Lacroix ne me fera pas l’honneur de m’écrire.

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