VI

Oui, grâce aux penseurs, à ces sages,

À ces fous qui disent : Je vois !

Les ténèbres sont des visages,

Le silence s’emplit de voix !

L’homme, comme âme, en Dieu palpite,

Et comme être, se précipite

Dans le progrès audacieux ;

Le muet renonce à se taire ;

Tout luit ; la noirceur de la terre

S’éclaire à la blancheur des cieux.

Ils tirent de la créature

Dieu par l’esprit et le scalpel ;

Le grand caché de la nature

Vient hors de l’antre à leur appel ;

À leur voix, l’ombre symbolique

Parle, le mystère s’explique

La nuit est pleine d’yeux de lynx ;

Sortant de force, le problème

Ouvre les ténèbres lui-même,

Et l’énigme éventre le sphinx.

Oui, grâce à ces hommes suprêmes,

Grâce à ces poëtes vainqueurs,

Construisant des autels poëmes

Et prenant pour pierres les cœurs,

Comme un fleuve d’âme commune,

Du blanc pilône à l’âpre rune,

Du brahme au flamine romain,

De l’hiérophante au druide,

Une sorte de Dieu fluide

Coule aux veines du genre humain.

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