XXV

Amor, ch’a null’ amato amar perdona,
Mi prese del costui placer si forte
Che, come vedi, ancor non m’abbandona.

Dante

Contempler dans son bain sans voiles

Une fille aux yeux innocents ;

Suivre de loin de blanches voiles ;

Voir au ciel briller les étoiles

Et sous l’herbe les vers luisants ;

Voir autour des mornes idoles

Des sultanes danser en rond ;

D’un bal compter les girandoles ;

La nuit, voir sur l’eau les gondoles

Fuir avec une étoile au front ;

Regarder la lune sereine ;

Dormir sous l’arbre du chemin ;

Être le roi lorsque la reine,

Par son sceptre d’or souveraine,

L’est aussi par sa blanche main ;

Ouïr sur les harpes jalouses

Se plaindre la romance en pleurs ;

Errer, pensif, sur les pelouses,

Le soir, lorsque les andalouses

De leurs balcons jettent des fleurs ;

Rêver, tandis que les rosées

Pleuvent d’un beau ciel espagnol,

Et que les notes embrasées

S’épanouissent en fusées

Dans la chanson du rossignol ;

Ne plus se rappeler le nombre

De ses jours, songes oubliés ;

Suivre fuyant dans la nuit sombre

Un Esprit qui traîne dans l’ombre

Deux sillons de flamme à ses pieds ;

Des boutons d’or qu’avril étale

Dépouiller le riche gazon ;

Voir, après l’absence fatale,

Enfin, de sa ville natale

Grandir la flèche à l’horizon ;

Non, tout ce qu’a la destinée

De bien réels ou fabuleux

N’est rien pour mon âme enchaînée

Quand tu regardes inclinée

Mes yeux noirs avec tes yeux bleus !

12 septembre 1828.

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