III

Histoire, poésie, il joint du pied vos cimes.

Éperdu, je ne puis dans ces mondes sublimes

Remuer rien de grand sans toucher à son nom ;

Oui, quand tu m’apparais, pour le culte ou le blâme,

Les chants volent pressés sur mes lèvres de flamme,

Napoléon ! soleil dont je suis le Memnon !

Tu domines notre âge ; ange ou démon, qu’importe ?

Ton aigle dans son vol, haletants, nous emporte.

L’œil même qui te fuit te retrouve partout.

Toujours dans nos tableaux tu jettes ta grande ombre ;

Toujours Napoléon, éblouissant et sombre,

Sur le seuil du siècle est debout.

Ainsi, quand, du Vésuve explorant le domaine,

De Naple à Portici l’étranger se promène,

Lorsqu’il trouble, rêveur, de ses pas importuns

Ischia, de ses fleurs embaumant l’onde heureuse

Dont le bruit, comme un chant de sultane amoureuse,

Semble une voix qui vole au milieu des parfums ;

Qu’il hante de Pæstum l’auguste colonnade,

Qu’il écoute à Pouzzol la vive sérénade

Chantant la tarentelle au pied d’un mur toscan ;

Qu’il éveille en passant cette cité momie,

Pompéi, corps gisant d’une ville endormie,

Saisie un jour par le volcan ;

Qu’il erre au Pausilippe avec la barque agile

D’où le brun marinier chante Tasse à Virgile ;

Toujours, sous l’arbre vert, sur les lits de gazon,

Toujours il voit, du sein des mers et des prairies,

Du haut des caps, du bord des presqu’îles fleuries,

Toujours le noir géant qui fume à l’horizon !

Décembre 1828.

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