II

Console-toi ! la Grèce est libre.

Entre les bourreaux, les mourants,

L’Europe a remis l’équilibre ;

Console-toi ! plus de tyrans !

La France combat : le sort change.

Souffre que sa main qui vous venge

Du moins te dérobe en échange

Une feuille de ton laurier.

Grèces de Byron et d’Homère,

Toi, notre sœur, toi, notre mère,

Chantez ! si votre voix amère

Ne s’est pas éteinte à crier.

Pauvre Grèce, qu’elle était belle,

Pour être couchée au tombeau !

Chaque vizir de la rebelle

S’arrachait un sacré lambeau.

Où la fable mit ses ménades,

Où l’amour eut ses sérénades,

Grondaient les sombres canonnades

Sapant les temps du vrai Dieu ;

Le ciel de cette terre aimée

N’avait, sous sa voûte embaumée,

De nuages que la fumée

De toutes ses villes en feu.

Voilà six ans qu’ils l’ont choisie !

Six ans qu’on voyait accourir

L’Afrique au secours de l’Asie

Contre un peuple instruit à mourir.

Ibrahim, que rien ne modère,

Vole de l’Isthme au Belvédère,

Comme un faucon qui n’a plus d’aire,

Comme un loup qui règne au bercail ;

Il court où le butin le tente,

Et lorsqu’il retourne à sa tente,

Chaque fois sa main dégouttante

Jette des têtes au sérail !