II

Comme je m’écriais ainsi, vous m’entendîtes ;

Et vous, dont l’âme brille en tout ce que vous dites,

Vous tournâtes alors vers moi paisiblement

Votre sourire triste, ineffable et calmant :

— L’humanité se lève, elle chancelle encore,

Et, le front baigné d’ombre, elle va vers l’aurore.

Tout l’homme sur la terre a deux faces, le bien

Et le mal. Blâmer tout, c’est ne comprendre rien.

Les âmes des humains d’or et de plomb sont faites.

L’esprit du sage est grave, et sur toutes les têtes

Ne jette pas sa foudre au hasard en éclats.

Pour le siècle où l’on vit - comme on y souffre, hélas ! —

On est toujours injuste, et tout y paraît crime.

Notre époque insultée a son côté sublime.

Vous l’avez dit vous-même, ô poète irrité ! —

Dans votre chambre, asile illustre et respecté,

C’est ainsi que, sereine et simple, vous parlâtes.

Votre front, au reflet des damas écarlates,

Rayonnait, et pour moi, dans cet instant profond,

Votre regard levé fit un ciel du plafond.

L’accent de la raison, auguste et pacifique,

L’équité, la pitié, la bonté séraphique,

L’oubli des torts d’autrui, cet oubli vertueux

Qui rend à leur insu les fronts majestueux,

Donnaient à vos discours, pleins de clartés si belles,

La tranquille grandeur des choses naturelles,

Et par moments semblaient mêler à votre voix

Ce chant doux et voilé qu’on entend dans les bois.

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