III

Toi, mon père, ployant ta tente voyageuse,

Conte-nous les écueils de ta route orageuse,

Le soir, d’un cercle étroit en silence entouré.

Si d’opulents trésors ne sont plus ton partage,

Va, tes fils sont contents de ton noble héritage :

Le plus beau patrimoine est un nom révéré.

Pour moi, puisqu’il faut voir, et mon cœur en murmure,

Pendre aux lambris poudreux ta vénérable armure ;

Puisque ton étendard dort près de ton foyer,

Et que, sous l’humble abri de quelques vieux portiques,

Le coursier, qui m’emporte aux luttes poétiques,

Laisse rouiller ton char guerrier ;

Lègue à mon luth obscur l’éclat de ton épée ;

Et du moins qu’à ma voix, de ta vie occupée,

Ce beau souvenir prête un charme solennel.

Je dirai tes combats aux muses attentives,

Comme un enfant joyeux, parmi ses sœurs craintives,

Traîne, débile et fier, le glaive paternel.

Août 1823.