III

D’Enghien s’étonnera, dans les célestes sphères,

De voir sitôt l’ami, cher à ses jeunes ans,

À qui le vieux Condé, prêt à quitter nos terres,

Léguait ses devoirs bienfaisants.

À l’aspect de Berry, leur dernière espérance,

Des rois que révère la France

Les ombres frémiront d’effroi ;

Deux héros gémiront sur leurs races éteintes,

Et le vainqueur d’Ivry viendra mêler ses plaintes

Aux pleurs du vainqueur de Rocroy.

Ainsi, Bourbon, au bruit du forfait sanguinaire,

On te vit vers d’Artois accourir désolé ;

Car tu savais les maux que laisse au cœur d’un père

Un fils avant l’âge immolé.

Mais bientôt, chancelant dans ta marche incertaine,

L’affreux souvenir de Vincenne

Vint s’offrir à tes sens glacés ;

Tu pâlis ; et d’Artois, dans la douleur commune,

Sembla presque oublier sa récente infortune,

Pour plaindre tes revers passés.

Et toi, veuve éplorée, au milieu de l’orage

Attends des jours plus doux, espère un sort meilleur ;

Prends ta sœur pour modèle, et puisse ton courage

Être aussi grand que ton malheur !

Tu porteras comme elle une urne funéraire ;

Comme elle, au sein du sanctuaire,

Tu gémiras sur un cercueil ;

L’hydre des factions, qui, par des morts célèbres,

A marqué pour ta sœur tant d’époques funèbres,

Te fait aussi ton jour de deuil !

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