V

L’enfant, quand du Seigneur sur lui brille l’aurore,

Ignore le martyre et sourit à la croix ;

Mais un autre baptême, hélas ! attend encore

Le front infortuné des rois. —

Des jours viendront, jeune homme, où ton âme troublée,

Du fardeau d’un peuple accablée,

Frémira d’un effroi pieux,

Quand l’évêque sur toi répandra l’huile austère,

Formidable présent qu’aux maîtres de la terre

La colombe apporta des cieux.

Alors, ô roi chrétien ! au Seigneur sois semblable ;

Sache être grand par toi, comme il est grand par lui ;

Car le sceptre devient un fardeau redoutable

Dès qu’on veut s’en faire un appui.

Un vrai roi sur sa tête unit toutes les gloires ;

Et si, dans ses justes victoires,

Par la mort il est arrêté,

Il voit, comme Bayard, une croix dans son glaive,

Et ne fait, quand le ciel à la terre l’enlève,

Que changer d’immortalité !