I

Je voyais s’élever, dans le lointain des âges,

Ces monuments, espoir de cent rois glorieux ;

Puis je voyais crouler les fragiles images

De ces fragiles demi-dieux.

Alexandre, un pêcheur des rives du Pirée

Foule ta statue ignorée,

Sur le pavé du Parthénon ;

Et les premiers rayons de la naissante aurore

En vain dans le désert interrogent encore

Les muets débris de Memnon.

Ont-ils donc prétendu, dans leur esprit superbe,

Qu’un bronze inanimé dût les rendre immortels ?

Demain le temps peut-être aura caché sous l’herbe

Leurs imaginaires autels.

Le proscrit à son tour peut remplacer l’idole ;

Des piédestaux du Capitole

Sylla détrône Marius.

Aux outrages du sort insensé qui s’oppose !

Le sage, de l’affront dont frémit Théodose,

Sourit avec Démétrius.

D’un héros toutefois l’image auguste et chère

Hérite du respect qui payait ses vertus ;

Trajan domine encore les champs que de Tibère

Couvrent les temples abattus.

Souvent, lorsqu’en l’horreur des discordes civiles,

La terreur planait sur les villes,

Aux cris des peuples révoltés,

Un héros, respirant dans le marbre immobile,

Arrêtait tout à coup par son regard tranquille

Les factieux épouvantés.

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