II

Quand Dieu, las de forfaits, se lève en sa colère,

Il suscite un fléau formidable aux cités,

Qui laisse après sa fuite un effroi séculaire

Aux murs, longtemps inhabités.

D’un vil germe, ignoré des peuples en démence,

Un géant pâle, un spectre immense

Sort et grandit au milieu d’eux ;

Et la ville veut fuir, mais le monstre fidèle,

Comme un horrible époux, la couvre de son aile,

Et l’étreint de ses bras hideux !

Le peuple en foule alors sous le mal qui fermente

Tombe, ainsi qu’en nos champs la neige aux blancs flocons ;

Tout succombe, et partout la mort qui s’alimente

Renaît des cadavres féconds.

Le monstre l’une à l’autre enchaîne ses victimes ;

Il les traîne aux mêmes abîmes ;

Il se repaît de leurs lambeaux ;

Et, parmi les bûchers, le deuil et les décombres,

Les vivants sans abris, tels que d’impures ombres,

Errent loin des morts sans tombeaux.

Quand le cirque s’ouvrait, aux jours des funérailles,

Tous les romains en paix, par leurs licteurs couverts,

Voyaient de loin lutter les captifs des batailles,

Livrés aux tigres des déserts.

Ainsi dans leur effroi les nations s’assemblent ;

Un long cri monte aux cieux qui tremblent,

Au loin de mers en mers porté.

Le monde armé, craignant l’hydre aux ailes rapides,

Garde sous leur fléau ces mourants homicides,

Et les menace, épouvanté !

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