I

Qu’il passe en paix, au sein d’un monde qui l’ignore,

L’auguste infortuné que son âme dévore !

Respectez ses nobles malheurs ;

Fuyez, ô plaisirs vains, son existence austère ;

Sa palme qui grandit, jalouse et solitaire,

Ne peut croître parmi vos fleurs.

Il souffre assez de maux, sans y joindre vos joies !

Chaque pas qui l’enfonce en de sublimes voies,

Par une douleur est compté.

Il pleure sa jeunesse avant l’âge envolée,

Sa vie, humble roseau, qui se courbe accablée

Du poids de l’immortalité.

Il pleure, ô belle enfance, et ta grâce et tes charmes,

Et ton rire innocent et tes naïves larmes,

Ton bonheur doux et turbulent,

Et, loin des vastes cieux, l’aile que tu reposes,

Et, dans les jeux bruyants, ta couronne de roses

Que flétrirait son front brûlant !

Il accuse et son siècle, et ses chants, et sa lyre,

Et la coupe enivrante où, trompant son délire,

La gloire verse tant de fiel,

Et ses vœux, poursuivant des promesses funestes,

Et son cœur, et la Muse, et tous ces dons célestes,

Hélas ! qui ne sont pas le ciel !

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