I

Pourtant je m’étais dit : « Abritons mon navire.

Ne livrons plus ma voile au vent qui la déchire.

Cachons ce luth. Mes chants peut-être auraient vécu !

Soyons comme un soldat qui revient sans murmure

Suspendre à son chevet un vain reste d’armure,

Et s’endort, vainqueur ou vaincu ! »

Je ne demandais plus à la muse que j’aime

Qu’un seul chant pour ma mort, solennel et suprême !
Le poëte avec joie au tombeau doit s’offrir ;

S’il ne souriait pas au moment où l’on pleure,

Chacun lui dirait : « Voici l’heure !

Pourquoi ne pas chanter, puisque tu vas mourir ? »

C’est que la mort n’est pas ce que la foule en pense !

C’est l’instant où notre âme obtient sa récompense,

Où le fils exilé rentre au sein paternel.

Quand nous penchons près d’elle une oreille inquiète,

La voix du trépassé, que nous croyons muette,

A commencé l’hymne éternel !

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