L’OPINION DE MARX

Dans la post-face de la seconde édition allemande du Capital, Marx écrit :

« Des circonstances historiques particulières, déjà en grande partie mises en lumière par Gustave de Grelich dans son Histoire du Commerce et de l’Industrie, ont longtemps arrêté chez nous l’essor de la production capitaliste et, partant, le développement de la société moderne, de la société bourgeoise. »

Dans le Manifeste communiste, dans le chapitre consacré à la critique du « socialisme allemand ou socialisme vrai », Marx et Engels déclarent que si la littérature sociale allemande, la littérature socialiste du premier tiers du XIXe siècle comme la littérature révolutionnaire de la fin du XVIIIIe siècle, a un caractère factice d’idéologie abstraite, c’est parce qu’il manquait à la philosophie allemande, pour lui donner solidité et efficacité, une substance historique ; c’est que ni les intérêts de la bourgeoisie, ni conséquemment les intérêts à la fois solidaires et antagoniques du prolétariat n’y avaient été assez développés.

La littérature socialiste et communiste de la France est née sous la pression d’une bourgeoisie dominante ; elle est l’expression littéraire de la lutte contre cette domination. Elle fut introduite en Allemagne à une époque où celle-ci ne venait que de commencer sa lutte contre l’absolutisme féodal.

« En Allemagne, des philosophes ou des gens teintés de philosophie et de bel esprit s’emparèrent avidement de cette littérature. Ils oublièrent seulement qu’en important en Allemagne ces écrits français on n’y transportait pas en même temps les conditions de l’existence française... Pareille éventualité s’était déjà vue au XVIIIe siècle. Les revendications de la Révolution française avaient paru de même aux philosophes allemands d’alors n’être que des revendications générales de la raison pratique » (c’est-à-dire de la philosophie de Kant). Les actes par lesquels se manifestait la volonté de la bourgeoisie française révolutionnaire, à leurs yeux, exprimaient les lois de la volonté pure, de la volonté telle qu’elle doit être, de la vraie volonté humaine. »

Je ne recherche point en ce moment si Marx, ici, est juste envers l’effort révolutionnaire de la pensée allemande. Je note seulement que d’après lui, l’insuffisance de la vie économique de la bourgeoisie allemande en 1789 rendait impossible toute application réelle, substantielle, de la Révolution française à l’Allemagne.

Share on Twitter Share on Facebook