LA RÉFUTATION DE BURKE

George Forster, qui faisait en 1791, dans la Revue allemande, le compte rendu de la littérature anglaise, a noté le vif mouvement qui suivit. Les réflexions, les réfutations abondèrent.

« L’homme d’Etat Burke, ou, si l’on ne veut pas jeter de la poudre aux yeux des lecteurs avec le pédantisme prétentieux qui abuse des mots sonores, le vieux faiseur de phrases échauffé Burke n’a soulevé une si violente opposition que parce qu’il a tenté d’accabler sous ses sophismes, ses inconséquences et ses débiles agressions la Constitution française. Son plus puissant adversaire, le juriste Mackintosh, remporta sur lui une victoire complète, qui est d’autant plus brillante que ses Vindiciæ Gallicæ ont donné la preuve Gallicœ ont donné la preuve indéniable que l’on peut écrire avec une éloquence virile sans se permettre un seul mot inconvenant et s’en tenir à la vérité, à la discussion des raisons pour et contre, et à la question posée, sans tout le vieux jeu de miroir d’une dialectique jésuitique. Inattaquable, irréfutable, son œuvre est debout, honorée de l’approbation unanime de l’Angleterre, et elle brave le front d’airain de ceux qui osent tout affirmer parce qu’ils n’ont plus rien à perdre en fait d’honneur et de considération. Ce n’est point ici le lieu d’insister, et notre public ne s’intéresse point assez à l’analyse des autres réfutations de l’œuvre de Burke ; il suffit de dire que Tatham, Towers, Boutfield, Bather, Rotsdoung, Pigott, Miss Wolstonecraft, MM. Macaulay, Graham, Hamilton, Capell Lofft, Wolsey, sir Brooke Boothbv Dupont, et une foule d’écrivains anonymes ont tourné contre lui leurs armes avec plus ou moins de bonheur, mais toujours avec quelque succès. Pour sa justification, il se sentit encore obligé, par le cri universel du public, à faire une faible tentative et, dans son appel des nouveaux whigs aux anciens wighs, il tenta par des distinctions superfines d’excuser le parti de l’opposition dont il se réclamait d’avoir dévié ainsi des principes des whigs. »

La réprobation fut-elle aussi générale que le dit Forster, passionné dès lors pour la Révolution et qui se soulageait, dans ses comptes rendus critiques, du silence qu’il se croyait encore tenu de garder en Allemagne sur le fond même des choses ? Il est probable que la véhémence rhétoricienne de Burke choqua un peu et que ce brusque torysme intransigeant fit quelque scandale. Aussi bien, en cette année 1791, la Révolution semblait avoir atteint une période de calme et un point d’équilibre. Sa force de propagande au dehors ne s’exerçait que discrètement et la violence de Burke, à l’unisson de laquelle seront bientôt les esprits (dès la fin de 1792), déconcertait un peu en ce moment.

Share on Twitter Share on Facebook