XXXIX Eugène à Stephen

Je suis sous-officier, frère !

Hier, j’ai vu le feu pour la première fois. Au premier coup de canon, j’ai tremblé ; tous ceux qui m’entouraient n’étaient pas plus rassurés ; mais, dix minutes après, les trompettes, les hennissements des chevaux, l’odeur de la poudre nous avaient enivrés. On a commandé une charge. Il n’y avait plus devant mes yeux ni danger, ni sabres, ni pistolets ; je n’avais plus qu’une volonté, c’était d’aller en avant ; mon beau cheval volait, et c’est moi qui ai porté le premier coup de sabre.

Oh ! alors, frère, j’avais la force de dix hommes ; mon sabre était comme un glaive de feu.

À la nuit, on a sonné la retraite. Je n’ai pas même été blessé. Je suis sous-officier.

Adieu, frère, il faut remonter à cheval.

Je n’aurais rien compris au beau cadeau que j’ai reçu sans ta lettre, que je n’ai eue que le lendemain. Merci à ma bonne sœur ; quand je la verrai, je serai officier.

Share on Twitter Share on Facebook