LXVII Stephen à Magdeleine

Je n’ai plus que toi, toi seule au monde, Magdeleine ; mon frère, mon Eugène, mon frère bien-aimé est mort ; c’est un lien de moins à la vie, je n’ai plus que toi. C’était la seule part de mon âme que tu n’avais pas : tu hérites de lui.

Je suis bien triste, bien accablé. Le pauvre enfant a souffert sans avoir auprès de son lit de douleur un regard ami, sans presser la main de son frère. Je me reproche sa mort plus que je ne puis te le dire.

Aime-moi, Magdeleine, aime-moi, j’en ai bien besoin, je suis tout à toi, je n’ai plus rien que toi ; donne une larme à Eugène, Magdeleine ; il était bon, brave et beau, sa vie avait une riante aurore. Pleure avec moi, Magdeleine, pleure, je suis seul, bien seul. Pauvre enfant ! quand j’aurais voulu lui dire adieu. Son visage, si gai, si riant, contracté convulsivement par la douleur ; ses jolis cheveux blonds souillés de sang, son corps brisé, sa face pâle, son œil terne, autrefois si vif… horrible chose !

Oh ! si j’avais été près de lui, je l’aurais couvert de mon corps, je l’aurais sauvé ; il aimait la vie, la sienne était dorée de bonheur et d’insouciance ! il l’a quittée en la regrettant, en se cramponnant après elle.

Ô mon frère ! mon Eugène ! adieu !

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