LXVIII

Dans les plaines l’herbe est jaunie…

Poëte, échauffe-toi du feu de ton génie ;

Tu n’as pas d’autre feu.

À quelques jours de là, Stephen reçut une lettre de son père. Après un long sermon sur la désobéissance des enfants, qui avait causé la mort d’Eugène, disait-il, il annonçait que, pour la dernière fois, il écrivait à Stephen pour l’engager à profiter de ce funeste exemple, suivre les avis de gens plus sensés que lui et venir épouser sa cousine, qui était encore libre et à laquelle on avait caché sa folie.

Stephen refusa, quoiqu’il fût alors plus pauvre et plus nécessiteux que jamais. Peu à peu, l’impression funeste de la mort de son frère prit une teinte un peu moins sombre. Il s’habitua à penser qu’il n’y avait plus pour lui ni peines ni souffrances, qu’il était heureux au ciel ou qu’il était anéanti. Il avait reçu d’un officier, qui en avait eu la commission d’Eugène mourant, le sabre de son frère, le sabre qu’il avait à la main le jour de son funeste accident. Ce présent lui donna une consolation : il avait eu l’adieu de son frère.

D’autre part, il avait la promesse positive qu’un mois encore etil serait installé dans la place, objet de tous ses désirs, qui devait lui permettre de demander Magdeleine à son père.

L’isolement du cœur où le mettait la mort d’Eugène lui rendait plus nécessaire encore son rapprochement de celle qui était toute sa vie et tout son bonheur, et il pressait de tous ses vœux chaque jour, chaque instant.

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