Les petits frais nécessités par son déménagement avaient enlevé les quelques florins qui restaient à Hélène. Elle était réduite au produit de son travail; aussi ne nourrissait-elle son enfant et elle que de pommes de terre et de haricots cuits dans l’eau. Quelquefois, lorsque son ouvrage était mieux payé, elle faisait cuire de la viande et faisait de la soupe. C’était, ces jours-là, un grand régal et une grande fête dans la mansarde. Cependant arriva l’hiver et le froid. Quoiqu’elle passât à l’ouvrage une partie de la nuit, il lui devint impossible d’avoir du charbon pour se chauffer. Le temps d’une femme est si peu rétribué, qu’elle s’aperçut que son travail de la nuit ne payait pas l’huile qu’il fallait brûler.
Alors elle mit sa fille dans une petite école, où elle profitait du feu ; et elle avisa à faire quelques économies sur ses misérables dépenses afin de payer le florin et demi qu’il lui fallait donner à l’école chaque mois. Elle se passait de feu et s’enveloppait les pieds dans une vieille couverture ; puis elle prit le parti de ne plus allumer de lumière pour épargner l’huile, et de tricoter, ce qu’elle pourrait faire sans voir clair, depuis cinq heures jusqu’à minuit ; seulement un moment elle allumait la lampe pour voir le portrait de Maurice.
De temps à autre cependant, elle recevait des lettres du propriétaire qui l’avait chassée. Il lui demandait humblement pardon, et mettait toute sa fortune à ses pieds. Mais Hélène, qui se voyait maigrir, se disait : — Je mourrai bientôt ; j’enverrai à Maurice ma fille avec une lettre, il prendra soin d’elle ; je n’ai besoin de rien.