Ta lettre m’a beaucoup affligée, ma chère Hélène. Comment des gens bons et honnêtes comme vous ne sont-ils pas protégés par le ciel ? tandis que tant de méchans prospèrent ! Espérons que ton père vivra, chère Hélène ; tous les malheurs, ne peuvent ainsi tomber sur vous à la fois.
Néanmoins, ce serait folie à toi, maintenant que vous n’avez plus l’appui de ton frère, de négliger une excellente place qui se présente, une place où tu gagnerais par an deux cents florins. C’est chez une dame que l’on dit bonne et vertueuse ; tu n’aurais à t’occuper que d’elle, de lui tenir compagnie, lui faire des lectures et l’aider à sa toilette.
Mais il faudrait partir tout de suite : j’ai promis que tu serais arrivée demain ; c’est sur cette promesse seulement que l’on n’a pas pris une autre personne très recommandée, qui s’était offerte. Je comprends tout le chagrin que tu vas avoir de quitter ton père malade et ta mère accablée ; mais songe que c’est un moyen de leur être utile, et que n’en pas profiter ne serait pas une vraie tendresse, mais un pur égoïsme.
À la réception de ma lettre, fais promptement tes paquets et viens me trouver ; nous irons ensemble chez cette dame, qui, d’après ce que je lui ai dit de toi, attend ton arrivée avec une grande impatience. — Pense bien qu’un jour de retard te ferait perdre cette place.