… Rarahu ne connaissait pas du tout le dieu Taaroa, non plus que les nombreuses déesses de sa suite ; elle n’avait même jamais entendu parler d’aucun de ces personnages de la mythologie polynésienne. La reine Pomaré seule, par respect pour les traditions de son pays, avait appris les noms de ces divinités d’autrefois et conservait dans sa mémoire les étranges légendes des anciens temps…
… Mais tous ces mots bizarres de la langue polynésienne qui m’avaient frappé, tous ces mots au sens vague ou mystique, sans équivalents dans nos langues d’Europe, étaient familiers à Rarahu qui les employait ou me les expliquait avec une rare et singulière poésie.
– Si tu restais plus souvent à Apiré la nuit, me disait-elle, tu apprendrais avec moi beaucoup plus vite une foule de mots que ces filles qui vivent à Papeete ne savent pas… Quand nous aurons eu peur ensemble, je t’enseignerai, en ce qui concerne les Toupapahous, des choses très effrayantes que tu ignores…
En effet, il est dans la langue maorie beaucoup de mots et d’images qui ne deviennent intelligibles qu’à la longue, quand on a vécu avec les indigènes, la nuit dans les bois, écoutant gémir le vent et la mer, l’oreille tendue à tous les bruits mystérieux de la nature.