1er décembre 1873.
Le départ pour Moorea s’organisa de grand matin sur la plage.
Le chef Tatari, qui rejoignait son île, donnait passage à Taïmaha et à moi sur la recommandation de la reine. – Il emmenait aussi deux jeunes hommes de son district, et deux petites filles qui tenaient des chats en laisse. Ce fut en face même de la case abandonnée de Rouéri que nous vînmes nous embarquer ; le hasard avait amené ce rapprochement.
Ce n’était pas sans grand’peine que ce voyage avait pu s’arranger, l’amiral ne comprenait point quelle nouvelle fantaisie me prenait d’aller courir dans cette île de Moorea, et, en raison du peu de temps que le Rendeer devait passer à Papeete, il m’avait pendant deux jours refusé l’autorisation de partir. De plus, les vents régnants rendaient les communications difficiles entre les deux pays, et la date de mon retour à Tahiti restait problématique.
On mettait à l’eau la baleinière de Tatari ; les passagers apportaient leur léger bagage et prenaient gaîment congé de leurs amis ; nous allions partir.
A la dernière minute, Taïmaha, changeant brusquement d’idée, refusa de me suivre ; elle alla s’appuyer contre la case de Rouéri, et, cachant sa tête dans ses mains, elle se mit à pleurer.
Ni mes prières, ni les conseils de Tatari ne purent rien contre la décision inattendue de cette femme, et force nous fut de nous éloigner sans elle.