XIII

La brise d’est, qui est comme la respiration puissante du Sahara, s’était levée peu à peu et augmentait d’intensité à mesure qu’on s’éloignait de la mer.

Un vent desséchant, chaud comme un souffle de forge, passait maintenant sur le désert.

– Il semait partout une fine poussière de sable et apportait avec lui la soif ardente du Bled-el-Ateuch.

On jetait continuellement de l’eau sur les tentes qui abritaient les spahis ; – un nègre traçait avec un jet de pompe des arabesques rapides qui disparaissaient à mesure, – vaporisées presque subitement dans l’atmosphère altérée.

Cependant on approchait de Podor, l’une des plus grandes villes du fleuve, – et la rive du Sahara s’animait.

C’était l’entrée du pays des Douaïch, pasteurs enrichis par leurs razzias de bétail faites en pays nègre. Ces Maures passaient le Sénégal à la nage en longues caravanes, chassant devant eux dans le courant, à la nage aussi, des bestiaux volés.

Des campements commençaient à paraître dans la plaine sans fin. – Les tentes en poil de chameau, raidies sur des pieux de bois, ressemblaient à de grandes ailes de chauves-souris tendues sur le sable ; – elles formaient des dessins bizarres d’une grande intensité de noir, – au milieu d’un pays jaune, toujours aussi uniformément jaune.

Un peu plus d’animation partout, – un peu plus de mouvement et de vie.

Sur les berges, des groupes plus nombreux accourant pour regarder. – Des femmes mauresques, des belles cuivrées à peine vêtues, ayant au front des ferronnières de corail, trottant à califourchon sur des petites vaches bossues ; – et souvent, derrière elles, des enfants gambadant à cheval sur de tout petits veaux rétifs, – des enfants nus, la tête rasée avec de grandes houppes en crinière, – et le corps fauve et musclé comme de jeunes satyres.

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