Le choc des deux armées eut lieu plus loin ; il fut très meurtrier, bien qu’il ait fait peu de bruit en France.
Ces combats, livrés en pays si lointain, et où si peu d’hommes sont engagés, passent inaperçus de la foule ; ceux-là seuls s’en souviennent qui y ont perdu un fils ou un frère.
La petite troupe française faiblissait, quand Boubakar-Ségou reçut, presque à bout portant, un paquet de chevrotines dans la tempe droite. La cervelle du roi nègre jaillit au dehors en bouillie blanche ; – au son du tabala et des cymbales de fer, il tomba au milieu de ses prêtres, empêtré dans ses longs chapelets d’amulettes – et ce fut pour ses tribus le signal de la retraite.
L’armée noire reprit sa course vers les contrées impénétrables de l’intérieur, et on la laissa fuir. Les Français n’étaient plus en état de la poursuivre.
On rapporta à Saint-Louis le serre-tête rouge du grand chef rebelle. – Il était tout brûlé et criblé de trous de mitraille.
Une longue écharpe de talismans y était attachée : c’étaient des sachets diversement brodés, renfermant des poudres mystérieuses, des dessins cabalistiques et des prières dans la langue du Maghreb.
Cette mort produisit un effet moral assez considérable sur les populations indigènes.
Le combat fut suivi de la soumission de plusieurs chefs insurgés, et on put le considérer comme une victoire.
La colonne rentra promptement à Saint-Louis ; on conféra plusieurs grades et décorations, à tous ceux qui y avaient pris part, – mais les rangs s’étaient bien éclaircis chez les pauvres spahis !…