LXV

Au sortir de Paimpol, Marie est remontée avec son fils dans la diligence, qui s’ébranle et les emmène. Par la portière, elle regarde sa belle-mère, qui est tout de même venue de Plouherzel les conduire jusqu’à la ville, mais qui leur a dit un bonjour glacial, un bonjour bref à faire mal au cœur.

Elle la regarde, et elle ne comprend plus : la voilà qui court maintenant, qui court après la voiture, – et puis sa figure qui change, qui leur fait comme une grimace. Qu’est-ce qu’elle leur veut ? Et Marie regarde presque effrayée. Elle grimace toujours. Ah !… C’est qu’elle pleure ! Ses pauvres traits se contractent tout à fait, et voici les larmes qui coulent… Elles se comprennent maintenant toutes les deux.

« Pour l’amour de Dieu ! Faites arrêter la voiture, monsieur », dit Marie à un Islandais qui est assis près d’elle, et qui a compris, lui aussi ; car il passe son bras au travers du petit carreau de devant et tire le conducteur par sa manche.

La voiture s’arrête. La grand-mère qui a toujours couru, est là derrière, à toucher le marchepied ; elle leur tend les mains, et sa figure est toute baignée de larmes.

Marie est descendue, et la vieille femme, la serrant dans ses bras, l’embrassant, embrassant petit Pierre :

« Ô ma chère fille, que le bon Dieu t’accompagne ! » Et elle pleure à sanglots.

« Voyez-vous, ma fille, avec Yves, il faut être très douce, le prendre par le cœur ; vous verrez que vous pourrez être heureuse avec lui. Moi, j’ai peut-être trop montré les gros yeux à son pauvre père. Dieu vous bénisse, ma chère fille !… »

Et les voilà, unies dans le même amour pour Yves, et pleurant ensemble.

« Allons, les femmes ! Crie le conducteur, quand vous aurez fini de frotter vos museaux ? »

Il faut arracher l’une de l’autre. Et Marie, rassise dans son coin, regarde en s’éloignant, avec ses yeux pleins de larmes, la vieille femme, qui s’est affaissée en sanglotant, sur une borne, tandis que petit Pierre, avec sa petite main potelée, lui fait adieu par la portière.

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