IX

« Lorsque fut la troisième nuit » comme eut dit Shéhérazade, le roi prit conseil de Tertia qui lui répondit gaîment :

« Fais venir Secunda. Nous ne nous ennuierons pas une minute.

– Je la croyais si prude et si pieuse.

– C'est pour çà qu'elle m'amuse. Elle et moi, on prétend que nous sommes les deux extrêmes ; aussi je couche avec elle presque tous les soirs ; et c'est elle que j'imitais avant-hier quand je te parlais de ma pudeur ; mais il faut l'entendre ! Elle est d'une connerie !

– Eh bien !

Je ne dis plus rien. Tu vas l'entendre. » Tertia partit en courant.

* * *

Elle revint tenant sa sœur par le bras et l'interpella la première :

« Confesse-toi par mortification, sainte Secunda ! Le roi va t'interroger sur ce que tu sais le mieux.

– Ce que je sais le mieux, c'est que je suis une misérable pécheresse, mon père, et vous entendrez une triste confession.

– S'il est vrai, dit le Roi, je consens que tu te mortifies.

Cela est bon pour ta conscience et ne peut que la soulager.

L'aveu est agréable aux âmes bien nées.

– Oui, je dirai tout ! je dirai tout ! je dirai tout ! Si j'oublie quelque chose, Tertia, rappelle-le moi ! Je ne veux rien cacher.

– Commence par ce que tu fais quand tu couches toute seule. Je ne suis pas toujours dans ta chambre. Allons ! le Roi t'écoute. »

Secunda leva les yeux au ciel et soupira :

« Nuit et jour je me sens brûlée par l'appétit charnel.

– Qu'appelles-tu ainsi ?

– Une ardeur qui m'envahit de la tête aux pieds. Elle prend source d'une partie… que les jeunes filles ne nomment pas.

– C'est ce que les jeunes filles appellent un con, fit Tertia.

– Quand je rentre dans ma chambre pour me mettre en prière, ce désir charnel me distrait. Aussi ai-je pris pour objet de méditations la Vie de Ste Marie l’Égyptienne afin de rêver sans remords à des nudités, mon père. Mais quand j'imagine la Sainte se livrant aux déportements de sa jeunesse, loin de me calmer, cela m'enflamme, je ne puis plus résister et je… je…

– Parle.

– Je me pollue.

– Elle se pollue ! répéta Tertia qui pleurait de gaîté. Eh bien, dis comment tu te pollues.

– Je me mets nue comme la Sainte. Pour me faire honte à moi-même, je tiens entre mes jambes une petite glace où je vois toutes mes parties honteuses et leur ignominie et je rougis des pollutions que je commets sous mes yeux. Parfois je m'assieds au bord d'un fauteuil devant ma grande glace et j'invente les plus sales postures afin d'en rougir davantage. »

Elle s'interrompit, haleta un instant, et dit :

« Aucune mortification ne me serait plus cruelle, mon père, que si je me polluais devant vous ! D'ailleurs, je ne saurais sans cela poursuivre cette confession qui m'embrase.

– Elle a envie de se polluer ! fit Tertia dans un nouveau rire. Ne retrousse pas ta robe, tu es ridicule ! Puisque l'émotion te coupe la parole, attends qu'on te déshabille et qu'on te présente. »

Le déshabillage accompli, Tertia reprit avec autorité : « Tes mains derrière le dos ! tu te pollueras plus tard. Mortifie-toi d'abord en te présentant toi-même. Qu'est-ce que c'est que çà ?

– L'impudicité de mon sein nu. Les mamelons allongés par mes attouchements. Les stigmates de mes souillures.

– Et ces cheveux noirs ?

– Un voile que la Providence fait croître devant mes parties secrètes pour m'en dérober la vue.

– Elle n'y réussit guère. Et çà ?

– L'obscénité de mes lèvres honteuses.

– Pourquoi as-tu fait un nœud à tes poils ?

– Pour me rappeler un rêve de la nuit dernière chaque fois que je me polluerai aujourd'hui. Un rêve luxurieux. Je vais le dire tout haut. »

Elle se jeta sur le dos en travers du lit, releva entièrement les cuisses et balbutia en se masturbant :

« Elle ici… Lui là…. Je… Je… Ah ! je le dirai plus tard !.~ J'ai la tête en feu… Je pêche ! Je pêche !

– Çà veut dire qu'elle décharge, expliqua Tertia, – Pardon, mon Dieu ! pardon !

– Toutes mes filles sont toquées » fit le roi songeur.

Il s'écoula quelque temps avant que Secunda recouvrât ses esprits.

Enfin elle se leva et, après un soupir, reprit la confession interrompue.

« Je ne me borne pas, mon père, aux attentats que je commets sur moi-même. J'éprouve à l'égard de Tertia une concupiscence infâme.

– Infâme ! répéta sa sœur en l'imitant.

– Je lui fais subir des attouchements qui la provoquent au péché. Ma bouche elle-même se prostitue à des lubricités innommables.

– Innommables !

– La licence de ses gestes et de ses propos m'attirent. Au lieu de la moraliser et de la reprendre…

– Quand je te dis : fous-moi ton cul sur la gueule…

– J'ai l'abjection de le faire et d'y trouver plaisir ; moi son aînée qui devrais la nourrir de la manne éternelle…

– Tu ne me nourris que de foutre, mais chaque fois j'en ai la bouche pleine.

– Et je me sens plus abjecte encore quand je prends la même posture sous elle.

– Parle donc de ce que tu aimes le mieux !

– Non ! oh ! non ! dis-le, toi ! Je n'en peux plus !

– Prends la pose, et je le dirai. »

Secunda tomba en prière au pied du lit. Tertia, toujours gaie, une main sur la hanche, dit en la désignant de l'autre bras :

« Tu vois, papa, comme elle prie ? les reins creux, le derrière comme deux boules et les fesses tellement ouvertes qu'elle a l'air de prier les saints pour qu'on l'encule.

– Je sais que je suis impudique ! gémit l'agenouillée.

– Le premier soir où nous avons couché ensemble, quand elle s'est mise en prière, la figure dans les mains, je ne voyais plus rien que son trou du cul ; je l'ai goussé ; elle tressaillait, mais elle ne résistait pas. Alors, j'ai fourré ma langue dans le trou.

– Je n'en priais que mieux !

– C'est ce que j'ai compris. Aussi, j'ai retiré ma langue, j'ai enfoncé mon godmiché à la place, et puis… je ne sais comment cela c'est fait, mais sans que je la branle, rien qu'en remuant un peu le godmiché dans le cul, elle a déchargé.

– Ne t'ai-je pas dit qui je voyais, les yeux fermés ? et maintenant encore je la vois…

– Ste Marie l’Égyptienne ?

– Oui ! Sur son lit de jeunesse et de luxure. Elle est nue comme moi et à genoux comme je suis. Elle me sourit de ses yeux fardés. Derrière elle s'agenouille son amant. Elle prend le membre d'une main et me montre ce qu'elle lui offre. Ah ! ce péché de sodomie qui est le pire de tous ! Ah ! Tertia ! qu'attends-tu ?

– Prie la sainte de faire un miracle et que mon godmiché devienne une queue, une vraie !

– Oui ! elle veut bien. J'y crois de toute mon âme ! »

FIN

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