CHAPITRE XVI PAROLE DE CORSAIRE

À ce moment une grande rumeur venant du jardin se fit entendre. On était venu annoncer que trois nouveaux navires étaient en vue et s'approchaient à toutes voiles de la terre.

« Sont-ce des navires de guerre ? » demanda le gouverneur.

On ne sut pas lui répondre, car on ne pouvait encore distinguer ni leur forme, ni leur nationalité.

« Si nous allions jusqu'au port ? proposa lady Stanhope.

— C'est cela, allons jusqu'au port », appuyèrent les autres jeunes femmes qui ne demandaient qu'à satisfaire leur curiosité.

Malgré les objections que firent pour la forme les invités masculins, tout aussi désireux que le clan féminin de savoir ce qui en était, il y eut une véritable poussée vers le vestiaire.

Et bientôt toutes les jolies têtes, toutes les épaules frissonnantes, disparurent sous des mantes, des capuchons, des mantilles, et en procession lady Stanhope en tête, les invités du gouverneur, ravis de cet incident original, prirent le chemin du port.

L'aube, qui se levait à peine, enveloppait d'une teinte indécise ce défilé d'un nouveau genre. Et quand on fut arrivé, on put distinguer parfaitement, à quelques milles à peine, trois navires immobiles qui découpaient, dans l'azur très pâle du ciel, la silhouette fine de leur coque et de leurs voiles qu'une manœuvre amenait doucement.

« Ce sont les navires de Surcouf ! s'écria lady Stanhope avec étonnement.

— En êtes-vous sûre, milady ? demanda le gouverneur.

— Certes. Je les reconnais parfaitement maintenant. Celui du milieu est le Revenant, à droite, c'est la Sainte-Anne, à gauche, la Confiance.

— Pourquoi viennent-ils à Madras ? demanda quelqu'un.

— Surcouf, sans nul doute, veut profiter de la suspension d'armes, afin de communiquer avec la terre.

— En effet, ils ont arboré le drapeau blanc.

— Cependant ils restent à une distance respectable.

— C'est qu'ils ne peuvent avancer plus avant, Madras a une défense naturelle. Son rivage est entouré de fonds changeants dans lesquels un navire d'un certain tonnage ne peut s'aventurer sans danger. Et Surcouf, en marin consommé n'ignore pas cette particularité. »

Tandis qu'on causait sur le port et que les invités du gouverneur faisaient mille suppositions sur cette arrivée intempestive du fameux corsaire, il se faisait à bord des navires un mouvement inusité que l'on pouvait discerner du rivage.

Les matelots semblaient amener sur le pont deux colis énormes, puis on vit les poulies attachées au flanc du navire, et bientôt deux canots furent mis à la mer.

Ce fut ensuite le tour d'un grand canot plat, sorte de chaland, à bords élevés pour empêcher les petites vagues du large de pénétrer à l'intérieur.

Puis ce chaland, amené contre le flanc du navire, y fut solidement maintenu, tandis qu'au-dessus les poulies faisaient glisser les deux gros colis.

Quand le chargement parut fini, les deux canots attelés au chaland prirent le chemin du rivage.

Et parmi l'élégante réunion qui assistait à cet étrange débarquement, la curiosité était montée au plus haut degré.

« Qu'est-ce que cela veut dire ? » se demandait-on de proche en proche.

Le gouverneur paraissait même un peu inquiet. Est-ce que cette arrivée des Français traînant à leur suite ce chaland mystérieux ne cachait pas quelque piège ? On les savait d'un esprit fertile en ruses, et on connaissait la haine profonde de Surcouf pour tout ce qui était anglais.

Allait-il donc profiter de cette suspension d'armes, de la facilité avec laquelle il entrait dans le port pour préparer quelque surprise désastreuse, et cela au mépris de toutes les lois de la guerre ?

Il ne fut pas maître de son trouble et laissa échapper quelques paroles qui dévoilèrent ses craintes.

Lady Stanhope s'en émut aussitôt, en relevant courageusement son observation.

« Eh ! quoi, monsieur, soupçonneriez-vous ces hommes d'un tel acte de déloyauté ?

— Madame, répondit le gouverneur, un peu ennuyé pour certaines conceptions, une semblable action pourrait ne pas passer pour déloyale.

— Oh ! c'est là une chose impossible et qu'on ne peut concevoir sans avoir une âme vile. Ce n'est pas le cas, monsieur, pour Surcouf et ses compagnons, et moi, lady Stanhope, je me porte en toute Confiance garant de leur honneur. »

Ces paroles firent une certaine impression sur l'assistance, et lady Blackwood s'écria, en menaçant son amie du doigt :

« Ah ! chère, toujours le même enthousiasme pour ces Français !

— Oui, répondit sérieusement la jeune femme, et je puis d'autant mieux les juger, que j'ai été plus à même de les connaître. »

Les canots n'étaient plus maintenant qu'à quelques mètres du rivage. Bientôt ils accostèrent. Ceux qui les montaient eurent tôt fait de sauter sur le sable et d'y traîner les deux embarcations ; puis, s'attelant, à l'exception de trois d'entre eux, aux cordes, ils amenèrent le chaland.

Quand l'avant de celui-ci fut venu sans secousse s'enfoncer dans le sable, ces mêmes matelots, sautant à l'intérieur, se mirent en devoir de le décharger.

Un peu éloignés et abrités derrière une balustrade, les invités du gouverneur avaient pu voir sans être vus. Ce ne fut que lorsque six matelots, portant trois par trois sur leurs robustes épaules les deux corps de forme étrange que seule lady Stanhope commençait à reconnaître, se mirent en marche, précédés de trois hommes qui devaient être les chefs et suivis d'un autre matelot portant un volumineux paquet, que le gouverneur, entouré de sa femme, de lady Stanhope et de tous les invités, s'avança à leur rencontre.

La stupeur des arrivants parut grande devant cette foule d'hommes en grand uniforme ou en tenue de cérémonie et de femmes en robes de soie aux traînes étalées sur le sable et dont les vêtements, avec lesquels elles s'étaient enveloppées, ne parvenaient pas à dissimuler les épaules décolletées et l'éclat des parures.

De leur côté, les Anglais dévisageaient avidement ces trois hommes qu'ils avaient devant eux, et sur le visage desquels, grâce au récit de lady Stanhope, ils avaient pu mettre des noms.

L'un d'eux, le plus grand, beaucoup le reconnaissaient. C'était Jacques de Clavaillan.

Le jeune marquis, qui avait conservé ses traits fins d'aristocrate et cette expression des yeux à la fois audacieuse et franche, que soulignait sa longue moustache gauloise, s'était encore développé dans ce dernier voyage, et ce ne fut pas sans un certain respect que les jeunes officiers anglais, dont beaucoup étaient de fort beaux hommes, contemplèrent cette carrure d'athlète.

Dans cet adolescent, presque un homme déjà, tout le monde reconnut Guillaume Ternant le petit mousse breton, à la prière duquel lady Stanhope avait quitté ses amis pour aller consoler la mère et la sœur.

Enfin voici Surcouf lui-même. Et la brillante assemblée qui le regarde est obligée de s'avouer que la description de la jeune femme n'a rien exagéré.

Sans être d'aussi haute taille que Clavaillan, il est grand, parfaitement élégant. Ses traits sont d'une rare régularité et tonte sa personne respire la force.

Ce qui frappe tout d'abord en lui, c'est son regard. Ses yeux un peu enfoncés sous l'arcade sourcilière brillent d'un feu intense. Ce sont bien là les yeux de ce fouilleur d'horizon, des yeux d'aigle, qui toujours avant le reste de son équipage ont distingué l'ennemi.

Rien qu'avec ces yeux-là, il ne pourrait passer inaperçu, or tout le reste est à l'avenant. Le nez légèrement busqué a l'arête très fine, la bouche est d'un dessin parfait, et le menton assez accentué contribue à donner à ce masque d'homme un caractère d'énergie particulier.

D'abord surpris à la vue de tout ce monde, il ne tarda pas à se remettre. Et avec cette aisance aimable qui est un des apanages de la nation française et qui ne l'abandonne jamais, il salue le gouverneur et les dames.

Mais déjà lady Stanhope s'est avancée, et elle tend sa petite main sur laquelle le marin s'incline pour y poser ses lèvres avec une grâce respectueuse.

« Avouez, monsieur Surcouf, que vous ne vous attendiez pas à une semblable réception, s'écrie en riant la charmante femme.

— Non, madame, bien certainement, mais vous m'en voyez infiniment heureux. Au moins tous ces messieurs pourront affirmer que le corsaire Surcouf est un homme de parole et d'honneur. »

Il y eut à ces mots un moment de curiosité, et le marin faisant un signe aux matelots qui étaient restés à une petite distance, ceux-ci s'avancèrent toujours chargés de leurs gros colis.

« Madame, reprit Surcouf, vous n'avez pas oublié sans doute la promesse que je vous fis lors de notre séparation. Cette promesse, il s'en est fallu de peu que je ne pusse la tenir qu'à moitié. Dans la partie du butin qui m'échut au moment du partage, je reçus un de vos pianos, mais l'autre tomba aux mains du fisc, en la personne du commissaire. Ce ne fut pas sans difficultés que je le décidai à me le céder. Enfin je les ai tous les deux et j'ai l'honneur de vous les rapporter. »

Ces paroles furent accueillies par un formidable hourra.

Les hommes criaient, les femmes battaient des mains, et l'on fit une véritable ovation à nos marins.

Le gouverneur voulut serrer la main 'du vaillant Surcouf et de ses compagnons. Lady Blackwood, enthousiasmée, fit de même.

Quant à lady Stanhope, elle exultait, et ses yeux et son sourire disaient clairement :

« Vous voyez que je n'ai rien exagéré. Je savais bien, moi, que c'étaient de parfaits gentilshommes. »

Cependant on ne pouvait rester plus longtemps sur le port.

Sur l'invitation du gouverneur tout le monde reprit le chemin du palais, où un déjeuner improvisé, sorte de banquet en l'honneur des Français, fut offert à Surcouf, à Clavaillan, à Guillaume et à tous les invités de la nuit, pendant que les matelots étaient abondamment servis par les domestiques.

« Quel dommage, s'écria tout à coup le vieux général, de penser que, sitôt la suspension d'armes terminée, vous redeviendrez notre ennemi le plus acharné. »

Surcouf sourit.

« Qu'importe, général, nous ferons comme les enfants, qui ne sont jamais plus amis que lorsqu'ils se sont administré une formidable roulée. »

On applaudit à cette boutade, et le gouverneur, levant son verre, s'écria :

« J'en accepte l'augure, commandant, et je bois à la paix définitive qui unira nos deux grandes patries. »

Ce toast fut chaleureusement accueilli par toute l'assemblée.

Hélas ! personne ne se doutait alors des événements terribles qui se préparaient en Europe… Et comment le soleil éclatant de l'empire français, après avoir ébloui de ses rayons les lions voisins, allait sombrer dans une épouvantable catastrophe.

Mais, Dieu merci, il ne nous est pas donné de connaître l'avenir, et tandis que tous ces jeunes officiers choquaient joyeusement leurs verres, aucun d'eux ne prévoyait que la guerre impitoyable allait faire parmi ceux-là mêmes, de larges trouées.

Surcouf, fêté par tous, mais principalement par lady Stanhope et lady Blackwood, ravies toutes deux d'avoir leurs pianos, consentit à passer deux jours à terre.

Quant à Clavaillan et à Guillaume, malgré la même invitation, ils partirent le jour même de leur débarquement pour Ootacamund.

Personne, du reste, ne songea à s'étonner, mais lady Stanhope seule pensa qu'un petit cœur de jeune fille allait probablement battre une charge précipitée à l'arrivée des deux jeunes gens.

Elle ne se trompait pas, et Mme Ternant, qui depuis longtemps était dans le secret de sa fille, n'eut pas de peine à comprendre à qui allait une partie des effusions qu'Aune prodigua à son frère.

Jacques de Clavaillan peut-être s'en aperçut aussi. Seul, Will fut aveugle, et de la meilleure foi du monde garda pour lui seul les tendres caresses de sa sœur.

* * * * *

Plusieurs années se sont écoulées.

Mme Ternant et Anne n'habitent plus Ootacamund.

Elles ont quitté l'Inde brusquement quelques jours après l'arrivée des deux jeunes gens à Madras.

Surcouf leur ayant offert de les rapatrier, la pauvre mère, qui ne se sentait plus le courage de se séparer de son fils, résolut de l'accompagner et accepta cette proposition.

Il était du reste nécessaire que celui-ci revînt en France pour y compléter ses études et se préparer à l'École navale vers laquelle son ambition le dirigeait.

Quant à Anne, inutile de dire si la perspective de revoir la France, unie à celle d'un voyage en telle compagnie, était faite pour lui plaire. Elle l'accueillit donc avec une véritable joie.

Cependant le départ n'eut pas lieu sans un attendrissement.

On ne quitte pas un pays qui vous fut accueillant, une maison où l'on a pleuré et prié, où l'on a été heureux aussi, sans un serrement de cœur.

Au moment de dire adieu peut-être pour toujours à ce toit qui les avait abrités si longtemps, à ce jardin dans lequel Mme Ternant avait promené sa mélancolie et Anne ses rêves juvéniles, à ces domestiques qui leur étaient dévoués et qui pleuraient, les larmes s'échappèrent de leurs yeux.

« Au revoir, disait Aune qui était jeune.

— Adieu », faisait sa mère qui ne se lassait pas de regarder pour l'emporter plus vivant dans sa mémoire, le riant ermitage qu'elles aimaient tant toutes deux.

Clavaillan et Will, qui avaient d'abord assisté, très émus, au spectacle de leur chagrin, durent s'interposer pour les décider à partir.

Encore un dernier regard, un dernier geste d'adieu. et brusquement, à un coude de la route, tout disparaît. La voiture roule maintenant vers la demeure de l'Irlandais et de sa famille.

Oh ! cette route, combien de fois l'ont-elles parcourue à pied ou en voiture, pour se rendre chez leurs amis. Et voilà qu'Anne, qui a refait bien souvent depuis cette promenade à cheval, accompagnée par Fred ou Alick, ou même par Cécil, revit ce fameux jour où l'aîné des O'Donovan, dans un moment de mauvaise humeur, lui a dit :

« Vous n'étiez qu'une petite fille, il a voulu se moquer de vous. »

Il ne s'est pas moqué. Il est revenu. Et voilà qu'il vient la chercher pour la ramener en France.

Anne sait très bien qu'elle est encore trop jeune pour se marier, mais elle ne doute pas que cela arrive un jour ; et elle est bien décidée à attendre patiemment ce jour.

La séparation avec leurs amis fut encore plus cruelle, plus déchirante.

Ils aimaient tous, le père, la mère et les six garçons, ces deux Françaises, qui apportaient à leur foyer tant de grâce, de charme, de douce intimité et parfois d'entrain.

L'Irlandaise et son mari pleuraient l'amie qu'ils avaient si souvent consolée et qui leur était si profondément attachée ; ils pleuraient aussi Anne, qui illuminait leur demeure de sa joliesse de jeune fille.

Eux qui n'avaient que des fils, ils aimaient à contempler cette silhouette élégante et fine, à caresser ses boucles de jais, à entendre son rire cristallin vibrer dans la maison où ne résonnaient jamais que les organes un peu rudes des six garçons.

Quant à ceux-ci, laissant de côté toute velléité de stoïcisme, ils pleuraient bien franchement. Fred surtout laissait éclater un véritable désespoir.

Quant à Alick, le seul qui se contînt un peu, il enveloppait d'un regard sombre et désolé le joli visage de la fillette tout inondé de larmes.

« Nous nous reverrons, je vous promets que nous nous reverrons, disait Anne pour les consoler et se consoler elle-même… Vous viendrez bien en Europe ? »

Et comme ils semblaient dire qu'il y avait peu de probabilités pour cela, elle ajouta :

« Eh bien ! c'est nous qui reviendrons. »

En même temps, elle cherchait du côté des siens une approbation.

« Oui, nous reviendrons, mademoiselle Anne », fit Clavaillan avec assurance.

Anne le remercia d'un regard et se sentit toute consolée.

Le voyage se passa sans accidents, mais non sans incidents, ce qui eût été tout à fait extraordinaire à cause des temps troublés qu'on traversait.

Enfin on arriva à Brest, et l'image de l'Inde restée brillante et si chère tout le temps de la traversée pâlit subitement devant le rivage natal.

Oh ! la douceur de revoir son pays après une longue absence, comme tous la goûtèrent lorsque la vigie signala la terre. Et avec quelle émotion religieuse ils se retrouvèrent sur le sol de leur Bretagne chérie ! Certes, là-bas ils avaient trouvé une vie facile, un climat généreux, des amis dévoués. mais ils n'avaient jamais senti comme en ce jour vibrer certaines fibres de leur cœur.

Avec délices ils aspiraient l'air de la patrie, et Mme Ternant aurait volontiers embrassé toutes les Bretonnes qu'elle rencontrait.

Ce fut dans Brest même que la famille Ternant s'installa.

Will dut bientôt quitter sa mère et sa sœur pour continuer dans un collège ses études interrompues.

Clavaillan reprit la mer à la suite de Surcouf.

De nouveau seules, Mme Ternant et sa fille vécurent de cette vie retirée et laborieuse qu'elles menaient dans l'Inde, attendant que les événements les réunissent de nouveau à ceux qu'elles aimaient.

Et maintenant, voilà que les événements se sont précipités.

La fatale année de mil huit cent quinze est près de s'achever. L'empire français n'existe plus.

Les aigles sont tombés à Waterloo, vaincus par la fatalité.

L'Europe, si longtemps oppressée, respire.

Le génie qui la comprimait est désormais réduit à l'impuissance.

Napoléon s'est heurté à la pierre d'achoppement que Dieu, bien plutôt que les hommes, avait placée sur sa route.

Et cette pierre, ainsi que l'avait presque prophétisé le vieux général, dans la soirée donnée à Madras en l'honneur d'une jolie femme, cette pierre s'est précisément trouvée être ce Willesley, frère du marquis du même nom, ce cadet de famille dont la gloire dépasse maintenant celle des aînés et des ancêtres et qui porte triomphalement le titre de duc de Wellington.

L'Empereur, qui s'est confié à ses ennemis les plus acharnés, à ces Anglais qu'il n'a pu vaincre, va voir sa Confiance cruellement déçue.

Non seulement l'Angleterre n'a point pour lui les égards que l'on doit à l'ennemi vaincu et sans défense, mais sans pitié pour cette grandeur tombée, sans respect pour ce captif qui s'est livré lui-même, elle va le traiter avec cette impitoyable rigueur, avec cette étroitesse de surveillance qui briseront en lui toute énergie et qui en quelques années lui ouvriront les portes du tombeau.

Mme Ternant et Anne ont suivi avec angoisse la marche des événements, et le jour a lui enfin pour la jeune fille où son rêve va se réaliser.

Depuis le matin la cathédrale de Brest fait retentir l'air de ses plus joyeux carillons.

C'est un mariage qu'elle annonce.

Tout autour de la maison de Mme Ternant, il y a un va-et-vient indescriptible.

Les voisins et les passants qu'on renseigne veulent voir la jeune mariée que l'on dit si belle.

Et puis les uniformes qui entrent et sortent ne contribuent pas pour peu de chose à augmenter la curiosité.

On sait que le fiancé a servi sous les ordres de Surcouf, et que le fameux corsaire a promis d'assister son second en qualité de témoin.

Et tout le monde a le désir de le connaître.

Mais voilà que la porte s'ouvre toute grande et Anne, radieuse dans sa toilette blanche, paraît donnant le bras à un jeune homme qui porte l'uniforme de la marine royale.

C'est Will, le petit mousse de Surcouf. Il a brillamment passé ses examens d'admission à l'École navale et il en est sorti dans les premiers.

Il a même fait son premier voyage, et sur ses manches brillent les galons d'enseigne.

L’avenir a tenu les promesses du passé.

FIN

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