CHAPITRE XXXIII

J'avais une vieille parente de beaucoup d'esprit dont la conversation était des plus intéressantes ; mais sa mémoire à la fois inconstante et fertile, la faisait passer souvent d'épisodes en épisodes et de digressions en digressions, au point qu'elle était obligée d'implorer le secours de ses auditeurs : « Que voulais-je donc vous raconter ? » disait-elle, et souvent aussi ses auditeurs l'avaient oublié, ce qui jetait toute la société dans un embarras inexprimable. Or, l'on a pu remarquer que le même accident m'arrive souvent dans mes narrations, et je dois convenir en effet que le plan et l'ordre de mon voyage sont exactement calqués sur l'ordre et le plan des conversations de ma tante ; mais je ne demande main-forte à personne, parce que je me suis aperçu que mon sujet revient de lui-même, et au moment où je m'y attends le moins.

Share on Twitter Share on Facebook