VII – UN CHEF DE PARTI (SUITE)

Du plus loin que le capitaine aperçut son frère, il lui cria :

— Eh bien ! as-tu vu Gaspard Ier ? Comment t’a-t-il reçu ?

— Avec une bonté que je n’oublierai jamais.

— Je m’en réjouis fort.

— Oh ! George, quel homme !…

— Quel homme ! Un homme à peu près comme un autre ; ayant un peu plus d’ambition et un peu plus de patience que mon laquais, sans parler de la différence de l’origine. La naissance de Mr de Châtillon a fait beaucoup pour lui.

— Est-ce sa naissance qui lui a montré l’art de la guerre, et qui en a fait le premier capitaine de notre temps ?

— Non, sans doute, mais son mérite ne l’a pas empêché d’être toujours battu. Bah ! laissons cela. Aujourd’hui tu as vu l’Amiral, c’est fort bien ; à tout seigneur tout honneur, et il fallait commencer par faire ta cour à Mr de Châtillon. Maintenant… veux-tu venir demain à la chasse ? et là je te présenterai à quelqu’un qui vaut bien aussi la peine qu’on le voie ; je veux dire Charles, roi de France.

— J’irais à la chasse du roi !

— Sans doute, et tu y verras les plus belles femmes et les plus beaux chevaux de la cour. Le rendez-vous est au château de Madrid, et nous devons y être demain de bonne heure. Je te donnerai mon cheval gris pommelé, et je te garantis que tu n’auras pas besoin de l’éperonner pour être toujours sur les chiens.

Un laquais remit à Mergy une lettre que venait d’apporter un page du roi. Mergy l’ouvrit, et sa surprise fut égale à celle de son frère en y trouvant un brevet de cornette. Le sceau du roi était attaché à cette pièce, d’ailleurs en très bonne forme.

— Peste ! s’écria George, voilà une faveur bien soudaine ! Mais comment diable Charles IX, qui ne sait pas que tu es au monde, t’envoie-t-il un brevet de cornette ?

— Je crois en avoir l’obligation à Mr l’Amiral, dit Mergy.

Et il raconta alors à son frère l’histoire de la lettre mystérieuse qu’il avait décachetée avec tant de courage. Le capitaine rit beaucoup de la fin de l’aventure, et l’en railla sans pitié.

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