Dans la religion galloise (Voyez Davies, Myth. and rites of the British druids, et le même, Celtic researches), le dieu suprême, c'est le dieu inconnu, Diana (dianaff, inconnu, en breton; diana en léonais, dianan dans le dialecte de Vannes). Son représentant (p. 74) sur la terre c'est Hu le grand, ou Ar-bras, autrement Cadwalcader, le premier des druides.
Le castor noir perce la digue qui soutient le grand lac, le monde est inondé; tout périt, excepté Douyman et Douymec'h (man, mec'h, homme, fille), sauvés dans un vaisseau sans voiles, avec un couple de chaque espèce d'animaux. Hu attelle deux bœufs à la terre pour la tirer de l'abîme. Tous deux périssent dans l'effort; les yeux de l'un sortent de leur orbite, l'autre refuse de manger et se laisse mourir.
Cependant Hu donne des lois et enseigne l'agriculture. Son char est composé des rayons du soleil, conduit par cinq génies: il a pour ceinture l'arc-en-ciel. Il est le dieu de la guerre, le vainqueur des géants et des ténèbres, le soutien du laboureur, le roi des bardes, le régulateur des eaux. Une vache sainte le suit partout.
Hu a pour épouse une enchanteresse, Ked ou Ceridguen, dans son domaine de Penlym ou Penleen, à l'extrémité du lac où il habite.
Ked a trois enfants: Mor-vran (le corbeau de mer, guide des navigateurs), la belle Creiz-viou (le milieu de l'œuf, le symbole de la vie), et le hideux Avagdu ou Avank-du (le castor noir). Ked voulut préparer à Avagdu, selon les rites mystérieux du livre de Pherylt, l'eau du vase Azeuladour (sacrifice), l'eau de l'inspiration et de la science. Elle se rendit donc dans la terre du repos, où se trouvait la cité du juste, et, s'adressant au petit Gouyon, le fils du héraut de Lanvair, le gardien du temple, elle le chargea de surveiller la préparation du breuvage. L'aveugle Morda fut chargé de faire bouillir la liqueur sans interruption pendant un an et un jour.
Durant l'opération, Ked ou Ceridguen étudiait les livres astronomiques et observait les astres. L'année allait expirer, lorsque de la liqueur bouillonnante s'échappèrent trois gouttes qui tombèrent sur le doigt du petit Gouyon; se sentant brûlé, il porta le doigt à sa bouche... Aussitôt l'avenir se découvrit à lui; il vit qu'il avait à redouter les embûches de Ceridguen et prit la fuite. À l'exception de ces trois gouttes, toute la liqueur était empoisonnée: le vase se renversa de lui-même et se brisa... Cependant Ceridguen furieuse poursuivait le petit Gouyon. Gouyon, pour fuir plus vite, se change en lièvre. Ceridguen devient levrette et le chasse vigoureusement jusqu'au bord d'une rivière. Le petit (p. 75) Gouyon prend la forme d'un poisson; Ceridguen devient loutre et le serre de si près, qu'il est forcé de se métamorphoser en oiseau et de s'enfuir à tire-d'aile. Mais Ceridguen planait déjà au-dessus de sa tête sous la forme d'un épervier... Gouyon, tout tremblant, se laissa tomber sur un tas de froment, et se changea en grain de blé; Ceridguen se changea en poule noire et avala le pauvre Gouyon.
Aussitôt elle devint enceinte, et Hu-Ar-Bras jura de mettre à mort l'enfant qui en naîtrait; mais au bout de neuf mois, elle mit au monde un si bel enfant qu'elle ne put se résoudre à le faire périr.
Hu-Ar-Bras lui conseilla de le mettre dans un berceau couvert de peau et de le lancer à la mer. Ceridguen l'abandonna donc aux flots le 29 avril.
En ce temps-là, Gouydno avait près du rivage un réservoir qui donnait chaque année, le soir du 1er mai, pour cent livres de poisson. Gouydno n'avait qu'un fils, nommé Elfin, le plus malheureux des hommes, à qui rien n'avait jamais réussi; son père le croyait né à une heure fatale. Les conseillers de Gouydno l'engagèrent à confier à son fils l'épuisement du réservoir.
Elfin n'y trouva rien: et comme il revenait tristement, il aperçut un berceau couvert d'une peau, arrêté sur l'écluse... Un des gardiens souleva cette peau et s'écria en se tournant vers Elfin: «Regarde, Thaliessin! quel front radieux!»—«Front radieux sera son nom,» répondit Elfin. Il prit l'enfant et le plaça sur son cheval. Tout à coup l'enfant entonna un poëme de consolation et d'éloge pour Elfin, et lui prophétisa sa renommée. On apporta l'enfant à Gouydno. Gouydno demanda si c'était un être matériel ou un esprit. L'enfant répondit par une chanson où il déclarait avoir vécu dans tous les âges, et où il s'identifiait avec le soleil. Gouydno, étonné, demanda une autre chanson; l'enfant reprit: «L'eau donne le bonheur. Il faut songer à son Dieu; il faut prier son Dieu, parce qu'on ne saurait compter les bienfaits qui en découlent... Je suis né trois fois. Je sais comment il faut étudier pour arriver à savoir. Il est triste que les hommes ne veuillent pas se donner la peine de chercher toutes les sciences dont la source est dans son sein; car je sais tout ce qui a été et tout ce qui doit être.»
Cette allégorie se rapportait au soleil, dont le nom, Thaliessin (p. 76) (front radieux), devenait celui de son grand-prêtre. La première initiation, les études, l'instruction, duraient un an. Le barde alors s'abreuvait de l'eau d'inspiration, recevait les leçons sacrées. Il était soumis ensuite aux épreuves; on examinait avec soin ses mœurs, sa constance, son activité, son savoir. Il entrait alors dans le sein de la déesse, dans la cellule mystique, où il était assujetti à une nouvelle discipline. Il en sortait enfin, et semblait naître de nouveau; mais, cette fois, orné de toutes les connaissances qui devaient le faire briller et rendre un objet de vénération pour les peuples.
On connaît encore les lacs de l'Adoration, de la Consécration, du bosquet d'Ior (surnom de Diana). Ils offraient, près du lac, des vêtements de laine blanche, de la toile, des aliments. La fête des lacs durait trois jours.
Près Landélorn (Landerneau), le 1er mai, la porte d'un roc s'ouvrait sur le lac, au-dessus duquel aucun oiseau ne volait. Dans une île chantaient des fées avec la chanteuse des mers: qui y pénétrait était bien reçu, mais il ne fallait rien emporter. Un visiteur emporte une fleur qui devait empêcher de vieillir; la fleur s'évanouit. Désormais plus de passage; un brave essaye, mais un fantôme menace de détruire la contrée... Selon Davies (Myth and rites), on trouve une tradition presque semblable dans le Brecnockshire. Il y a aussi un lac dans ce comté, qui couvre une ville. Le roi envoie un serviteur... on lui refuse l'hospitalité. Il entre dans une maison déserte, y trouve un enfant pleurant au berceau, y oublie son gant; le lendemain, il retrouve le gant et l'enfant qui flottaient. La ville avait disparu.