M. Chardin 1 dit qu’il n’y a point de fleuve navigable en Perse, si ce n’est le fleuve Kur 2 , qui est aux extrémités de l’empire. L’ancienne loi des Guèbres, qui défendait de naviguer sur les fleuves, n’avait donc aucun inconvénient dans leur pays ; mais elle aurait ruiné le commerce dans un autre.
Les continuelles lotions sont très en usage dans les climats chauds. Cela fait que la loi mahométane et la religion indienne les ordonnent. C’est un acte très-méritoire aux Indes de prier 3 Dieu dans l’eau courante : mais comment exécuter ces choses dans d’autres climats ?
Lorsque la religion, fondée sur le climat, a trop choqué le climat d’un autre pays, elle n’a pu s’y établir ; et quand on l’y a introduite, elle en a été chassée. Il semble, humainement parlant, que ce soit le climat qui a prescrit des bornes à la religion chrétienne et à la religion mahométane 4 .
Il suit de là qu’il est presque toujours convenable qu’une religion ait des dogmes particuliers et un culte général. Dans les lois qui concernent les pratiques du culte, il faut peu de détails ; par exemple, des mortifications, et non pas une certaine mortification. Le christianisme est plein de bon sens : l’abstinence est de droit divin ; mais une abstinence particulière est de droit de police, et on peut la changer.
1 Voyage de Perse, tome II. (M.)
2 L’ancien Cyrus, affluent la mer Caspienne.
3 Voyage de Bernier, tome II. (M.)
4 Faut-il rappeler à M. de Montesquieu que le christianisme est né en Asie ; qu’il a été pendant plusieurs siècles florissant et régnant dans l’Asie et dans l’Afrique ; qu’il n’a cédé qu’à la violence et à la brutalité des armes mahométanes, et qu’actuellement encore, depuis l’Euphrate jusqu’à la Grèce, le nombre des chrétiens égale ou même surpasse celui des sectateurs de Mahomet. La raison du climat est donc une chimère, convaincue de faux même par les faits. (CRÉVIER.)