LETTRE CI.

M. LE CHEVALIER DE SOLIGNAC 1 , A M. DE MONTESQUIEU.

Monsieur, la Société littéraire de Nancy, au nom de laquelle j’ai l’honneur de vous écrire, a vu, avec une joie extrême, la lettre que vous avez écrite au Roi, son fondateur. Vous demandez, Monsieur, à Sa Majesté une grâce que nous aurions pris la liberté de vous demander à vous-même, si l’usage nous l’avait permis. Elle nous est d’autant plus précieuse qu’elle prévient nos désirs, et que nous connaissons les avantages que nous avons lieu d’en espérer. Ces avantages seraient bien plus grands, si nous pouvions nous flatter de l’honneur de vous posséder ici. Vous pouvez plus qu’un autre nous faire entrer dans l’esprit de nos lois, et nous apprendre à remplir les vues d’un monarque que vous aimez, et que nous voulons tâcher de satisfaire. C’en est déjà un moyen, Monsieur, que de vous donner une place parmi nous ; et nous vous l’accordons avec d’autant plus de plaisir que nous pouvons par là nous acquitter envers Sa Majesté d’une partie de notre reconnaissance.

Permettez que, déposant à présent la qualité de secrétaire de la Compagnie, je me félicite en mon particulier de l’honneur que je reçois de votre association. Je sens tout le prix de la gloire qui doit m’en revenir. C’en est une bien plus grande pour un homme qui n’a d’autre mérite que de goûter vos ouvrages, et, ce qui est au-dessus de vos ouvrages : le génie qui les a produits.

Je vous renouvelle ici avec bien de l’empressement mes anciens sentiments pour vous. Recevez-les, je vous conjure, comme un témoignage constant de l’inviolable et respectueux attachement avec lequel j’ai l’honneur d’être, etc.

1 M. de Solignac était secrétaire de la Société littéraire de Nancy, secrétaire de cabinet du Roi, et son historiographe.

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