XXII. – C. PLINE SALUE SON CHER GEMINUS.

L’indulgence pour les défauts.

Ne connaissez-vous pas de ces gens qui, esclaves de toutes les passions, s’indignent contre les vices des autres, comme s’ils en étaient jaloux, et demandent les punitions les plus sévères contre ceux qu’ils imitent le plus ? Et pourtant même à ceux qui n’ont besoin de l’indulgence de personne rien ne sied mieux que la bonté. Je pense même que l’homme le meilleur et le plus parfait est celui qui pardonne aux autres, comme s’il péchait tous les jours, et qui se garde de pécher, comme s’il ne pardonnait à personne. Ayons donc pour règle, soit dans la vie privée, soit dans la vie publique, soit dans n’importe quelle situation, d’être inflexibles pour nous, indulgents même pour ceux qui ne savent excuser qu’eux-mêmes, et souvenons-nous de la parole que cet homme si doux et, par cela même, si grand, Thraséas, aimait à répéter : « Qui hait les vices, hait les hommes. » Vous vous demandez peut-être quelle mouche me pique pour que j’écrive cela. Un individu, ces jours derniers,… mais il vaudra mieux en parler de vive voix, ou plutôt pas du tout car je crains que poursuivre, blâmer, rapporter ce que je désapprouve en lui, ne soit en contradiction avec la conduite que j’ai préconisée. Qui que ce soit et quel qu’il soit, silence ; le signaler ne serait pas utile pour l’exemple, ne pas le signaler importe beaucoup à la bonté. Adieu.

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