XII. – C. PLINE SALUE SON CHER MINICIUS.

Le mémoire promis.

Je vous envoie le petit opuscule que j’ai composé, à votre demande, pour que votre ami, ou plutôt notre ami (car tout n’est-il pas commun entre nous ?) pût au besoin s’en servir ; je vous l’envoie exprès un peu tardivement, afin que vous n’ayez pas le temps de le corriger, c’est-à-dire de le gâter. Vous en trouverez, après tout, toujours assez, sinon pour le corriger, du moins pour le gâter ; car vous autres, les puristes, vous retranchez toutes les beautés. Si vous le faites, je m’en féliciterai, car plus tard, profitant de quelque occasion, je présenterai vos suppressions comme mon bien et grâce à votre goût dédaigneux, c’est moi qui serai loué ; il en ira de même pour les passages que vous trouverez en note ou entre les lignes d’un autre style que l’ouvrage. Car, soupçonnant que vous trouveriez plein d’enflure ce qui n’est qu’un peu éclatant et pompeux, j’ai cru à propos, pour vous éviter des tourments, d’ajouter aussitôt une rédaction plus concise et plus modeste ou pour mieux dire plus terre à terre et plus médiocre, mais bien meilleure à votre goût, (car pourquoi me priverai-je de pourchasser et de traquer sans merci votre délicatesse ?) Voilà pour vous faire rire un peu parmi vos graves occupations ; voici du sérieux : songez à me rembourser le prix que j’ai payé pour vous envoyer un courrier tout exprès. Ainsi je suis sûr qu’en lisant cette demande ce n’est pas quelques parties de mon opuscule, mais l’opuscule entier que vous désapprouverez et auquel vous refuserez toute valeur, puisqu’on vous en réclame le prix. Adieu.

Share on Twitter Share on Facebook