Le don patriotique.
Vous me consultez sur le moyen de garantir même après vous une somme que vous avez offerte à nos compatriotes en vue d’un festin public. Cette consultation m’honore, mais le conseil n’est pas aisé. Verserez-vous le montant à la cité ? Il est à craindre qu’il ne soit dilapidé. Donnerez-vous des terres ? Devenues domaine public, elles seront négligées. Je ne vois rien de plus sûr que ce que j’ai fait moi-même. En garantie de cinq cent mille sesterces que j’avais destinés à une fondation alimentaire pour des garçons et des jeunes filles de naissance libre, j’ai fait à l’agent du fisc de la ville une vente fictive par mancipation d’une de mes terres, dont la valeur dépassait beaucoup la donation ; puis je l’ai reprise, chargée d’une redevance annuelle envers l’état de trente mille sesterces. Par ce moyen le fonds donné à l’état est en sûreté, le revenu certain, et la terre, donnant un rendement bien supérieur à la redevance, trouvera toujours un maître qui veuille la faire valoir. Je sais bien que j’ai pris sur ma fortune beaucoup plus que je ne parais avoir donné, puisque la charge de cette redevance ôte beaucoup de valeur à une très belle terre. Mais il convient de donner la préférence aux intérêts généraux sur les intérêts particuliers, aux choses éternelles sur celles qui périssent, et de prendre plus de précautions pour assurer son bienfait que son propre bien. Adieu.