Les deux jeunes avocats.
Ô jour heureux ! Appelé par le préfet de la ville à siéger à ses côtés, j’ai entendu les plaidoiries opposées de deux jeunes gens du plus bel avenir, du plus grand talent, Fuscus Salinator et Ummidius Quadratus, couple remarquable qui fera honneur non seulement à notre temps, mais aux lettres mêmes. Tous deux ont une honnêteté parfaite qui ne nuit en rien à leur fermeté, un air distingué, un accent bien latin, une voix mâle, une mémoire sûre, une grande intelligence avec autant de jugement ; j’ai été charmé de toutes ces qualités, mais surtout de ce qu’ils tenaient les yeux fixés sur moi comme sur leur guide et leur maître, et qu’ils semblaient aux auditeurs n’avoir qu’un désir, celui de m’imiter et de marcher sur mes traces. Ô jour heureux ! car je ne saurais trop le répéter ; ô jour qui mérite d’être marqué par moi d’un caillou éblouissant de blancheur ! Quoi de plus heureux en effet pour la patrie que des jeunes gens des plus nobles familles qui cherchent le renom et la gloire dans les lettres, et quoi de plus désirable pour moi que de servir de modèle à ceux qu’anime une noble ambition. Puissent les dieux me permettre de goûter toujours cette joie ! Puissent-ils encore (soyez témoin de mon vœu) accorder à tous ceux qui croiront honorable de m’imiter d’être meilleurs que moi ! Adieu.