SCÈNE I.

ISABELLE, LISETTE.

LISETTE.

Oui, tout a réussi, madame, par merveilles.

Éliante écoutait de toutes ses oreilles,

Et sur nos propos feints, dans sa vaine terreur,

Nous donne bien, je pense, au diable de bon cœur.

ISABELLE.

Elle croit tout de bon que j’en veux à Valère ?

LISETTE.

Et que trouvez-vous là que de fort ordinaire ?

D’une amie en secret s’approprier l’amant,

Dame ! attrape qui peut.

ISABELLE.

Ah ! très assurément

Ce procédé va mal avec mon caractère.

D’ailleurs…

LISETTE.

Vous n’aimez point l’amant qui sait lui plaire,

Et la vertu vous dit de lui laisser son bien.

Ah ! qu’on est généreux quand il n’en coûte rien !

ISABELLE.

Non, quand je l’aimerais, je ne suis pas capable…

LISETTE.

Mais croyez-vous au fond d’être bien moins coupable ?

ISABELLE.

Le tour, je te l’avoue, est malin.

LISETTE.

Très malin.

ISABELLE.

Mais…

LISETTE.

Les frais en sont faits, il faut en voir la fin,

N’est-ce pas ?

ISABELLE.

Oui. Je vais faire la fausse lettre.

À Valère feignant de la vouloir remettre,

Tu tâcheras tantôt, mais très adroitement,

Qu’elle parvienne aux mains de Dorante.

LISETTE.

Oh ! vraiment,

Carlin est si nigaud que…

ISABELLE.

Le voici lui-même :

Rentrons. Il vient à point pour notre stratagème.

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