COLETTE, soupirant, et s’essuyant les yeux de son tablier.
J’ai perdu tout mon bonheur ;
J’ai perdu mon serviteur ;
Colin me délaisse.
Hélas ! il a pu changer !
Je voudrais n’y plus songer :
J’y songe sans cesse.
J’ai perdu mon serviteur ;
J’ai perdu tout mon bonheur ;
Colin me délaisse.
Il m’aimait autrefois, et ce fut mon malheur.
Mais quelle est donc celle qu’il me préfère ?
Elle est donc bien charmante ! Imprudente bergère !
Ne crains-tu point les maux que j’éprouve en ce jour ?
Colin m’a pu changer ; tu peux avoir ton tour.
Que me sert d’y rêver sans cesse ?
Rien ne peut guérir mon amour,
Et tout augmente ma tristesse.
J’ai perdu mon serviteur ;
J’ai perdu tout mon bonheur ;
Colin me délaisse.
Je veux le haïr… je le dois…
Peut-être il m’aime encor… Pourquoi me fuir sans cesse ?
Il me cherchait tant autrefois !
Le Devin du canton fait ici sa demeure ;
Il sait tout : il saura le sort de mon amour :
Je le vois, et je veux m’éclaircir en ce jour.