CHAPITRE XXXXI.

SI au Palais Royal est estimé & favori celuy que le Roy caresse: en la maison de Dieu est aussi préféré celuy que Jesus-Christ chastie. Depuis le peché de nostre premier Pere, tous les hommes ont esté sujects à maladies & infirmitez du corps ou de l'esprit. A la verité les causes de nos maux sont diverses, mais les remedes propres sont bien différens aussi. Dieu chastie les bons ou les esprouve par diverses afflictions & maladies, au contraire des meschans qui sont punis pour leurs propre demerites, helas, nous sommes souvent trompez en nos jugemens, car tels semblent estre sauvez, quand au jugement des hommes qui devant Dieu sont en voye de damnation, & ceux que l'on croit souvent estre reprouvez, sont du nombre des enfant de Dieu: car le monde ne juge que de l'escorce & Dieu juge le dedans. Dieu demeure avec les malades & affligez, & le diable avec ceux qui sont en prosperité, & à qui toutes choses viennent à souhait, tesmoin l'histoire de sainct Ambroise où il est dit, qu'il n'eust pas plustost adverty son compagnon de sortir de la maison, où toutes choses prosperoient comme une maison maudite de Dieu, que tout fust abismé & le Maistre & la Maistresse escrazé avec leurs enfans sous les ruynes. O mon Dieu! le B. Frere Gille compagnon de sainct François avoit bien raison de dire que le demon de la prosperité estoit plus dangereux que celuy de l'adversité, car nous en voyons plus se perdre dans l'abondance, que dans la disette, car peu se desesperent pour l'une & tous se glorifient pour l'autre.

Constans fils du grand Constantin, qui fit autant de maux à l'Eglise que son pere luy avoit fait de bien, heretique Arrien qu'il estoit, se flattoit sur la prosperité de ses victoires, & de là tenoit sa vie par une juste punition de Dieu, de s'imagimer qu'il estoit dans la vraye foy, puis qu'il recevoit tant de faveurs du ciel, comme si les faveurs plustost que les disgraces estoient des tesmoisnages du vray amour de Dieu. A quoy selon le dire de Seneque le Philosophe, qu'il n'y a rien pis que la felicité des meschans, luy respondit fort bien Lucifer Evesque de Salare contemporain du grand S. Athanase, en un livre qu'il intitula, Des Roys Apostats, où il luy monstre que la prosperité temporelle n'est pas une marque asseurée de la vraye foy, & que bien souvent Dieu permet que les plus meschans Princes regnent long-temps, & les bon peu, ce qu'il confirme par les exemples de Basa Roy d'Israël qui regna vingt quatre ans, & son fils trente cinq ans, & Manasses Roy de Juda, le plus meschant de tous les Roys, bien que fils d'un bon pere Ezechias, qui regna cinquante sept ans, ce qui nous doit assez faire voir la vanité de ce siecle, où les plus mauvais ont plus grand part que les gens de bien, auquel il semble souvent que toutes choses leur aillent à contrepoil, ce que Dieu permet pour les chastier comme enfans, ou pour les rendre plus conformes à luy comme amis, & pour cet effet leur promet des ennemis pour les punir de leur fautes (car il n'y a si bon qui ne manque) ou pour les empescher l'attache des grandeurs d'icy bas, ou ils se pourroient aysement perdre sans la malice de ses ennemis, qui émoussent leur gloire, car d'un advertissement ou conseil d'amis on en fait assez peu d'estat s'il n'est à nostre goust, bien que Diogenes dise que pour cognoistre soy-mesme ses fautes, il faut avoir un vray amy, ou ennemy, car l'un ny l'autre ne vous celle rien, mais quand les péchez sont grands, & que nous avons trop offencé, si Dieu ne nous dit mot, c'est signe que nous sommes perdus, sinon il nous envoye des maladies, des pertes de biens, des traverses d'amis, & de plus il esleve les mechans contre nous qui nous esprouvent comme l'or dans le creuset. Et de fait Anastasius rapporte qu'un bon Religieux se plaignant à Dieu, de ce qu'il avoit permis que Phocas aprés, avoir tué l'Empereur Mauritius, & ses enfans, s'empara de l'Empire; Dieu luy respondit, qu'il l'avoit permis pour punir son peuple, & que s'il en eut trouvé un plus meschant pour luy mettre la couronne sur la teste, il l'eust faict.

Parlons maintenant de la santé du corps, & des maladies ordinaires qui arrivent indifféremment & naturellement aux bons, & aux mauvais, afin de ne nous esloigner trop, de nostre premier sujet, & disons que les anciens Egyptiens avoient accoustumé d'user de vomitifs pour guerir les maladies du corps, & de sobrieté pour se conserver en santé, car ils tenoient pour maxime, indubitable, que les maladies corporelles ne provenoient que d'une trop grande abondance & superfluité d'humeurs, & par consequent qu'il n'y avoit aucun remede meilleur, pour la santé, que le vomissement & la diette, mais la diette principalement.

Troque Laerce, & Lactance, dient la cause pourquoy les Grecs demeurent si long temps sans avoir Medecins, ce fut pour ce qu'ils cueillaient au mois de May des herbes odoriferantes qu'ils gardoient en leurs maisons, se faisoient seigner une fois l'an, & non pas tous les jours comme l'on faict à Paris, se baignoient une fois le mois, & ne mangeoient qu'une fois le jour, & estoient si exacts observateurs de cette temperance & sobrieté, que Platon ayant esté interrogé s'il avoit veu aucune chose nouvelle en Sicile; Je vy, respondit-il, un monstre en nature, c'est un homme qui se saouloit deux fois par jour. Cela, disoit il, pour Denys le Tiran, lequel fut le premier qui introduit la coustume de manger deux fois par jour, sçavoir est disner à midy, & souper au soir, car toutes les autres Nations avoient accoustumé seulement de souper le soir, & les seuls Hebrieux disnoient à midy.

De vouloir à present exiger cela de nous en général, il y auroit bien des oppositions, mesmes dans les Cloistres, car la nature n'a plus les forces du passé, & va tousjours débilitant à mesure que la fin du monde approche, c'est une science que j'appris du R. P. Gontery Jesuite, en une conference qu'il eut en la presence de la Reyne Marguerite, avec un Maistre des Requestes, qui disoit au contraire (mais assez mal à mon advis) que si le corps, & les forces corporelles eussent tousjours diminué depuis la création de l'homme, que nous serions à present comme de petits fourmis. Cela estoit un peu brusquement parlé devant cette sage Princesse, mais qui avoit tant de respect aux gens Doctes & de merites, qu'elle en souffroit mesmes les petites saillies d'esprit, lors qu'eschauffez dans les disputes elles leurs eschapoient avant d'y avoir pensé.

Il est vray que nous ne pouvons pas esgaler, ny imiter de bien prés les austeritez & penitences des anciens, à qui toutes rigueurs sembloient autant douces & faisables, comme à nous ameres & insupportables, soit pour nostre foiblesse & imbecilité, ou pour nostre deffaut d'amour de Dieu, qui est nostre plus grand mal, mais encores si en trouve il d'assez forts qui pourraient faire davantage qu'ils ne font s'ils vouloient, pour le salut, ou pour la santé corporelle, de laquelle nous sommes fort amateurs, & souvent mauvais conservateurs, car nous ne voulons pas nous mortifier en rien, & voulons vivre en paix & ayse, & suivre nos appetits, sans distinguer des choses propres ou impropres, & de là vient que nous tombons si sonvent malades & restons indisposez, où abrégeons nostre vie; mais quoy la sobrieté a perdu son procès, il n'y a plus d'Advocats pour elle, les frippons l'ont bannie des bonnes compagnies, & n'est plus receuë qu'où elle est le plus en hayne.

L'Empereur Aurelian vescut jusques en l'an septante & sixiesme de son aage, durant lequel temps il ne fut jamais seigné ne médeciné, hormis que tous les ans il entroit au bain, tous les mois il se provoquoit à vomir, & si jeusnoit un jour toutes lés sepmaines, & tous les jours prenoit une heure pour se promener, qui estoient tous regimes & remedes faciles & aysez à pratiquer par ceux qui en ont le desir, car il n'y a si pauvre ny si riche qui ne le puisse faire, & observer de point en point, mais qui commencera.

Nos Sauvages ont bien la dance & la sobrieté, avec les vomitifs, qui leur sont utils à la conservation de leur santé (car j'en ay veu quelqu'uns passer les jours entiers sans manger) mais ils ont encores d'autres preservatifs desquels ils usent souvent: c'est à sçavoir les estuves & sueries, par le moyen desquelles ils s'allegent & previennent les maladies, & puis ils sont tellement bien composez qu'ils sont rarement malades, & encores plus rarement goutteux, graveleux, hypocondres ou pulmoniques, mais ce qui ayde encor grandement à leur bonne disposition est, qu'ils sont engendrez de parens bien sains & dispos, d'un humeur & d'un sang bien temperé, & qu'ils vivent en une parfaite union & concorde entr'eux sont tousjours contens, n'ont aucun procés, s'interressent fort peu pour les grades & biens de la terre, qu'ils possedent avec une grande indifférence, c'est à dire, que les perdans ils ne perdent pas leur tranquilité, ainsi en usent les gens de bien, & non les autres, qui n'ont point d'amour de Dieu, & se piquent pour la moindre perte qui leur arrive.

Il n'y a neantmoins corps si bien composé ny régime si bien observé qui le puisse maintenir pour tousjours dans une egale santé, qu'il ne faille à la fin s'affoiblir ou succomber par divers accidens ausquels l'homme est sujet. Pour donc prevenir & remedier à tous ces deffauts & incommoditez du corps humain: outre les susdits remedes nos Sauvages ont des Medecins, Apoticaires, & Maistres des ceremonies qu'ils appellent Oki, ou Ondaxi, & d'autres Arondiouane, ausquels ils ont une grande croyance, pour autant qu'ils sont pour la pluspart grands Magiciens, grands devins, & invocateurs de Demons: Ils leur servent de Medecins, & Chirurgiens, & portent tousjours avec eux un petit sac de cuir dans quoy ils tiennent quelques petits remedes pour les malades, comme poudres de simples ou de racines, avec la tortue que l'Apoticaire luy porte en queue.

Ceux qui font particulière profession de consulter le diable, & predire les choses à venir ou cachées, (car tous n'en ont point le grade) ont quelques autres petits instrumens qui leur servent à ce mestier, dont je vous diray ceux qui se trouverent dans le sac de Trigatin, estimé bon Pirotois, & tres-excellent Medecin. Il y avoit premièrement une pierre un peu plus grosse que le poing taillée en ovalle, de couleur un peu rouge, ayant un traict noir tout autour prenant d'un bout à l'autre, dont ils tiennent que quand quelqu'un doit mourir de la maladie dont il est atteint, elle s'ouvre un peu par le petit traict noir, & que s'il n'en doit pas mourir elle ne s'ouvre point, s'entend qu'il faut que le Pirotois approche la pierre du malade.

Il y avoit aussi dans ce sac, cinq petits battons de cedre, longs de six ou sept pouces chacun, & un peu bruslé autour, desquels ils se servent pour predire les choses à venir, & pour advertir des passées. Qu'il ne s'y mette tout plein de bourdes parmy leurs propheties, personne n'en peut douter, c'est pourquoy est malheureux celuy qui hebeté s'y fie. Je ne fais point icy mention du petit tabourin de basque avec quoy ils resveillent l'esprit des malades, & conjurent le diable, pour ce que j'en ay parlé ailleurs, mais je vous diray que nous avons une grande obligation à nostre bon Dieu, de nous avoir donné de meilleurs Medecins, & pour le corps & pour l'ame, qui doit un jour jouyr de son Dieu.

S'il y a quelque malade en un village on l'envoye aussi tost querir, on l'informe de la maladie, on luy declare le temps qu'elle a commencé, si elle est naturelle, ou par fois: car il y a des meschans parmy eux aussi bien qu'entre les Epicerinys, qui en donnent à garder à ceux contre qui ils en veulent. Aprés quoy il fait des invocations à son Demon, il souffle la partie dolente, il y fait des incisions avec une pierre trenchante, en succe le mauvais sang, & fait en fin tout le reste de ses inventions, selon les maladies, car pour les sorts, il faut que les dances, chansons, Negromantie, soufflemens, bruits & hurlemens marchent aussi bien que les festins & récréations, qu'il ordonne tousjours pour premier appareil, afin de participer luy mesme à la feste; puis s'en retourne avec ses presens.

S'il est question d'avoir nouvelle des choses absentes ou advenir, aprés avoir interrogé son demon, il rend ses oracles, mais le plus souvent faux ou douteux, & quelquefois veritables: car le diable parmy les mensonges leur dit quelque verité pour se mettre en credit, & se faire croire habile esprit.

Un honneste Gentilhomme de nos amis nommé le sieur de Vernet, qui a demeuré une année avec nous au pays des Hurons, nous a asseuré, que comme il estoit dans la cabane d'une Sauvagesse vers le Bresil, qu'un Demon vint frapper trois grands coups sur la couverture de la cabane, & que la Sauvagesse qui cogneut que c'estoit son Demon, entra dés aussi tost dans sa petite tour d'escorce, où elle avoit accoustumé de recevoir ses oracles, & entendre les discours de ce malin esprit. Ce bon Gentilhomme, preste l'oreille, & escoutant le colloque entendit le diable que se plaignoit à elle, disant qu'il estoit fort las & fatigué, pour venir de fort loin guerir des malades, & que l'amitié particulière qu'il avoit pour elle, l'avoit obligé de venir voir ainsi lassé, puis pour l'advertir qu'il y avoit trois Navires François en mer qui arriveroient bien tost, ce qui fut trouvé veritable: car à trois ou quatre jours de là les Navires arriverent, & aprés que la Sauvagesse l'eut remercié, & fait ses demandes, le Demon disparut.

L'un de nos François estant tombé malade en la Nation du Petun, ses compagnons qui s'en alloient à la Nation Neutre, le laisserent à en la garde d'un Sauvage, auquel ils dirent. Si cestuy nostre camarade meure, tu n'as qu'à le despouiller de sa robbe, faire une fosse & l'enterrer dedans, car aussi bien ne feroit elle que se pourrir dans la terre. Ce bon Sauvage demeura tellement scandalisé du peu d'estat que ces François faisoient de leur compatriot, qu'il s'en plaignit par tout, disant qu'ils estoient des chiens d'abandonner ainsi leur compagnon malade, & de conseiller qu'on l'enterrast tout nud s'il venoit à mourir. Je ne feray jamais cette injure à un corps mort bien qu'estranger, disoit-il, & me despouillerois plustost de ma robbe pour le couvrir, que de luy oster la sienne pour m'en servir.

L'hoste de ce pauvre garçon sçachant sa maladie partit aussi-tost de sainct Gabriel, que nous appellons autrement la Rochelle, où Quieuindahon, d'où il estoit pour l'aller querir, & assisté de ce Sauvage qui l'avoit en garde l'apporterent dans une hotte sur leur dos jusques dans sa cabane, où en fin il mourut, apres avoir esté confessé par le Pere Joseph, & fut enterré en un lieu particulier hors du Cimetiere des Sauvages, le plus honorablement, & avec le plus de ceremonies Ecclesiastiques qu'il nous fut possible; dequoy les Sauvages resterent fort edifiez, & assisterent eux mesmes au convoy avec tous nos François, qui s'y trouverent avec leurs armes, car ils sont ensemblement ayse de voir honorer les trespassez. Ils ne voulurent pas neantmoins que ce corps fut enterré dans leur Cimetière, pour autant, disoient-ils, que nous n'avions rien donné, pour ses os, & qu'il faudrait qu'il eut part en l'autre vie, aux biens de leurs parens & amis deffuncts, s'il estoit enterré avec eux.

Nonobstant, les femmes & filles, firent les pleurs & lamentations accoustumez avec l'ordre du Médecin, qui luy-mesme s'estoit presenté pour faire son sabbat, & ses superstitions ordinaires envers ce pauvre garçon, mais nos Religieux ne luy voulurent pas permettre qu'il en approchast, car il n'avoit aucun remede naturel propre à la maladie, c'est pourquoy il fut renvoyé, & payé d'un grand mercy & puis à Dieu.

Je me suis informé d'eux, des principales plantes, & racines, desquelles ils se servent pour leurs maladies & blessures, mais entre toutes ils font principalement estat de celle appellée Oscar, les effects de laquelle font merveilleux & divins en la guerison des playes, ulceres, & blessures, aussi les Hurons en font une estime si grande que peu s'en faut qu'ils ne l'adorent, tant ils relevent & venerent ses vertus, & les bons effects qu'ils en reçoivent. Ils m'en donnerent un morceau, de la tige environ de la longueur du petit doigt, & gros un peu moins, je la consideray curieusement, & me sembla en tout approchant au fenouil, quoique ce soit une autre plante, & qui leur est rare, car on n'en trouve qu'en certains lieux.

Ils ont tout plein d'autres plantes, & racines de grande vertu, & mesme des arbres qui portent une escorce grandement excellente pour vomitif, & autres cures, mais je ne me fuis point informé des noms, ny de leurs principales proprietez, sinon de quelqu'unes qui me sont encores eschappées de la memoire, pour le peu d'expérience que j'ay aux choses de médecine.

Je croy que le Createur a donné aux Hurons le tabac ou petun, qu'ils appellent Hoüanhoüan, comme une manne necessaire pour ayder à palier leur miserable vie, car outre qu'elle leur est d'un goust excellentissime, elle leur amortit la faim & leur faict passer un long-temps sans avoir necessité de manger: & de plus elle les fortifie comme nous le vin, car quand ils se sentent foibles ils prennent un bout de petun, & les voyla gaillards. Elle a beaucoup d'autres vertus, qui nous sont icy incognues & non point à plusieurs Espagnols, qui la nomment pour cet effet l'herbe saincte, mais l'usage en est beaucoup meilleur & salubre aux Sauvages qu'à nous autres, à qui Dieu à donné en autre chose tout ce qui nous faict besoin, & conseillerois volontiers à tous les Gaulois de n'en user point, que par grande necessité, pour ce que le goust en est tellement charmant qu'en ayant pris l'usage, on ne s'en peut deffaire qu'avec grande difficulté dont j'en ay veu aucuns maudire l'heure de s'y estre jamais accoustumés.

J'ay dit quelque endroit de ce volume, que le Mayz ou bled d'Inde a beaucoup de suc & de substance, pour la nourriture du corps humain, mais plusieurs ont philosophé sur les autres vertus, ont jugé & trouvé par expérience, qu'il est fort propre à guerir les maux de reims, les douleurs de la vessie, la gravelle, & retentions d'urine, dequoy ils se sont advisez, pour avoir pris garde qu'il n'y a presque point d'Indiens qui soient travaillez de ces maladies, à cause de leur boisson ordinaire, qui est faicte de Mayz.

Nos Sauvages ont aussi des racines tres-venimeuses, qu'ils appellent Ondachiera, desquelles il se faut donner de garde, & ne se point hasarder d'y manger d'aucune sorte de racine, que l'on ne les cognoisse, & qu'on ne sçache leurs effects & leurs vertues; de peur des accidens inopinez qui nous sont quelquefois arrivez.

Nous eusmes un jour une grande apprehension d'un François, qui pour en avoir mangé d'une qu'il avoit luy mesme arrachée dans les forests, devint tout en un instant pasle comme la mort, & tellement malade que nous fusmes contraints d'avoir recours aux Sauvages pour avoir quelque remede à un mal si inopinement arrivé, lesquels luy firent avaller un vomitif composé d'eau & de simples, avec de l'escorce de certains bois qui luy fit rendre tout le venin qu'il avoit dans l'estomach, & par ce moyen fut guery, & appris pour une autre fois, de ne manger d'aucune herbe ny racine, que celles que les Sauvages luy diroient, ou desquelles il cognoistroit luy mesme les effects.

Continuation du traitté de la santé, & maladies des Sauvages, & de celles qui sont dangereuses & imaginaires. Des estuves & sueries, & du dernier remede qu'ils appellent Lonouoyroya.

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