I L’AMPHITHEÂTRE « THUCYDIDE » À TOMBOUCTOU

— Pat ! Par exemple ! j’ai failli ne pas te reconnaître ! Qu’est-ce qui t’est arrivé ?

— Le froid, le soleil,… fit Pat.

Il souriait et l’éclat de ses dents accentuait la teinte brique de son visage méconnaissable. Il expliqua :

— Pendant les vacances j’ai suivi les fouilles du Moyen Nord et je n’ai pas couché une fois sous terre.

— Moi, reprit Wassermann blanc comme un navet, j’étais aux stations de repos, sur les bords du nouveau Tanganika. Ah ! mon vieux, vingt-deux degrés toute la journée, on vit en pagnes. La voûte a par endroits trois cents mètres au-dessus du lac. Brise marine, vent, tempête à volonté. Planking, hydroplaneurs sur toutes les plages et les plus jolies filles du sous-sol ! Vois-tu ce que ça représente deux cents kilomètres de nappe d’eau souterraine, avec éclairage artificiel continu ?

— Un lieu dont j’aurais horreur, dit froidement Pat.

— Ça va ! fit Wassermann brusquement calmé par ce manque d’enthousiasme.

Ils suivaient l’allée de sable menant du vestiaire des ascenseurs au grand bâtiment neuf dont le fronton portait : Amphithéâtre Thucydide. D’autres groupes, enveloppés de peaux de phoque, se hâtaient sur le chemin en maugréant.

— Le vieux veut nous faire crever avec ses cours à l’extérieur.

— Moi c’est le soleil qui m’abîme les yeux, fit une fille à lunettes.

— Hé ! les faux-frères ! cria de loin en les voyant passer un étudiant qui avait enfilé une blouse blanche sur sa fourrure.

— Ophis ! s’exclama Wassermann, où es-tu inscrit ?

— À la section de botanique, dit Ophis, autant dire parmi les crétins.

— Et nous à la section d’histoire, rétorqua Pat.

— Oh ! alors ! fit Ophis sans chercher à dissimuler son dédain. Puis, sortant de la poche de sa blouse une boule irrégulière, il dit : « Tenez, regardez… »

— Qu’est-ce que c’est ? demanda Wassermann.

— La gloire de la serre 34 et le résultat de dix ans d’efforts : un fruit d’une espèce disparue qu’on est arrivé à faire repousser à partir de graines trouvées dans le Grand Nord : c’est une pomme.

— Est-ce que ça se mange ? fit Pat.

— Ça se mangeait, expliqua Ophis, ça se mange peut-être encore, mais pour l’instant, le morceau revient à plus de dix mille kilowatts, on le garde comme pièce de démonstration et les vieux vont le faire servir à des expériences.

Il disparut dans la serre. Devant l’entrée du souterrain de la bibliothèque, un groupe d’étudiants discutait. À l’étoile de carton gris qu’ils portaient sur la poitrine, on reconnaissait des scientifiques.

— Demandez à Évy, firent plusieurs voix.

Pat leva machinalement les yeux qu’il tenait sur le sable gelé de l’allée et son regard rencontra le visage d’Évy. Il pensait au fruit d’Ophis et ne comprit pas tout de suite ce qui se passait en lui.

— Nous verrons ça plus tard, répondit Évy. Pour l’instant, il convient de faire malgré tout quelque chose.

Il fallut le contraste désagréable entre le charme du visage et le timbre sec et dur de la voix, pour que Pat devînt conscient de l’émotion qu’il avait ressentie devant la nouvelle venue.

Mais déjà Wassermann se précipitait :

— Vous ! ici ! Vous ne m’aviez pas dit à Tanganika que vous suiviez les cours de la Faculté.

— Je ne dis que ce qu’il y a lieu de dire, fit froidement Évy.

Un peu décontenancé, Wassermann balbutia :

— Je vous présente mon ami Pat Sandersen, un archéologue futur…

— Ah ! fit Évy à peine polie. Et, sans plus de façon, elle se retourna vers les étudiants à l’étoile de carton : « Je prendrai la parole à la prochaine réunion, et je dirai que selon moi… »

Pat entraîna Wassermann qui eût volontiers insisté.

— Sais-tu qui c’est ? dit Wassermann. La fille de la Condamine, le vice-président du Conseil exécutif.

— Grand bien lui fasse, déclara Pat.

— Là-bas, elle était championne de hors-bords première série et prix d’excellence au concours des fleurs-scaphandres… J’étais le mille et unième de ses adorateurs.

— Je m’en fous, fit Pat.

Wassermann se cabra :

— Dis donc, ça ne te réussit pas les excursions sur la calotte polaire. Qu’est-ce que vous avez donc tous ? La mauvaise humeur d’un jour de rentrée ?…

Ils pénétrèrent dans l’amphithéâtre. Sur les gradins où auraient pu tenir cinq cents auditeurs, il y avait à peine une cinquantaine de sièges occupés. De haut en bas fusaient les interpellations joyeuses.

— Qu’est-ce que c’est que le cours d’histoire générale ? cria une voix jeune en scandant les syllabes.

— Le dernier prêche dans le désert ! répondit un autre au milieu des rires ironiques.

Ces rires et ces éternelles plaisanteries étaient pénibles à Pat. Il reporta son attention sur la coupole de verre où une grosse lentille mue par un héliostat faisait converger les rayons du soleil pâle sur la chaire encore vide du professeur.

— Avec ça, lui expliqua Wassermann, pendant tout le cours il aura dix-huit degrés sur son crâne chauve.

— La science vient au secours de l’histoire, remarqua mélancoliquement Pat.

Une petite porte s’ouvrit sur l’estrade. Précédé des appariteurs, un groupe de vieux messieurs fit son entrée. Des applaudissements s’élevèrent, un peu étouffés par les gants fourrés que beaucoup d’auditeurs avaient conservés. Le professeur gagna lentement la chaire. Avant de s’asseoir, il se tourna vers un personnage ventripotent qui se trouvait à sa droite et déclara :

— Mesdemoiselles, messieurs, je tiens d’abord à remercier, en votre nom et au mien, monsieur le doyen de la Faculté des Sciences qui nous fait l’honneur d’assister à la première leçon de notre cours.

Le doyen s’approcha de la chaire, à la toucher du ventre.

— Mes chers amis, dit-il avec une bonhomie un peu forcée pour masquer son défaut d’éloquence, j’ai tenu à venir en personne à cette séance inaugurale pour encourager ceux d’entre vous qui se consacreront aux études historiques. Il est de bon ton, je le sais, dans les groupes d’étudiants, de railler ceux qui suivent les cours de la Faculté des Lettres. Toutes les branches du savoir sont pourtant liées comme les doigts de la main. Le passé est toujours riche d’enseignements pour l’avenir. L’histoire est nécessaire, votre éminent professeur vous le prouvera, et vous-mêmes vous en rendrez mieux compte à mesure que vous avancerez dans la vie.

Comme le doyen s’asseyait au milieu des applaudissements et des sourires, le professeur s’inclina à nouveau pour le remercier. Puis, dans le silence qui suivit, on n’entendit plus que le bruit du papier pelure que les auditeurs engageaient sur les rouleaux caoutchoutés des machines à sténographier.

— « Mesdemoiselles, messieurs, commença alors le professeur, la venue de l’an 4000 que nous devons sous peu célébrer, me fournirait le prétexte, si prétexte il devait y avoir, au sujet du cours que j’ai choisi de traiter devant vous pendant la présente année scolaire. Il m’est apparu, en effet, que le moment était venu où l’on pouvait dresser un tableau d’ensemble, riche en multiples perspectives, de cette époque de l’histoire du globe et de l’humanité que, le premier, j’ai baptisée du nom d’ère quinquennaire, et qui va de la fin de l’ère quaternaire, en l’an 2006, jusqu’à nos jours. Au cours de cette première leçon, je me contenterai de vous exposer dans ses grandes lignes le plan général du cours que je vais être amené à vous faire.

« Nous commencerons d’abord par un rappel rapide des conditions de vie à l’ère quaternaire, cette époque aujourd’hui presque oubliée, si mal connue, cette époque dis-je où la terre comptait cinq parties du monde habitables, trois races de différente couleur, et où l’humanité, qui atteignait alors le chiffre de deux milliards d’individus, était morcelée en nations différentes dont la principale occupation était de se battre entre elles pour s’arracher des lambeaux de territoire ou des droits à l’exploitation des richesses naturelles. Nous avons peine à concevoir la gravité de ces rivalités d’un autre âge. Mais toute l’époque quaternaire peut être placée sous le signe de la lutte : combats entre individus, combats entre tribus, luttes des seigneurs féodaux, guerres entre nations, entre classes, entre races. Le trop-plein des forces de la jeune humanité placée dans des conditions de vie exceptionnellement faciles, n’avait alors pour s’employer que ces rivalités dont nous ne trouvons plus la trace héréditaire que dans les jeux brutaux auxquels se livre encore de nos jours l’heureuse confrérie du jeune âge.

« Comme vous le savez, la fin de l’ère quaternaire est fixée avec précision en l’an 2006, date à laquelle firent leur apparition les premiers troubles dans l’activité solaire. En effet, il semblerait qu’à l’exemple de l’humanité, le soleil lui-même se fût laissé gagner par le goût des perturbations. En moins de dix ans, la moyenne de l’énergie annuellement irradiée par celui que les bardes et les poètes de l’époque disparue appelaient « l’astre du jour », diminua d’environ vingt pour cent, bouleversant complètement les conditions d’habitabilité de la planète. Les calottes glaciaires des pôles, autrefois refoulées au delà des cercles polaires, débordèrent jusqu’aux tropiques du Cancer et du Capricorne, laissant pour toute région libre de glace une assez étroite bande, à cheval sur l’équateur, où la moyenne de la température à l’air libre se maintient péniblement aux environs du zéro centigrade. C’est sur cette étroite bande de terre que dut désormais se poursuivre la vie de l’humanité.

« Des troubles consécutifs à cette révolution astrale qui bouleversait toutes les conditions de la vie économique et sociale, de la vie tout court, nous avons peine à nous faire maintenant une idée précise. Il nous faudra essayer de retracer par le menu l’histoire de cette ruée de peuples et de races qui, de l’hémisphère nord où s’était concentrée la civilisation ancienne, dévalèrent vers le centre de l’Afrique, le Brésil et l’Australie devenus les seules terres habitables. Nous essaierons de faire revivre cette période d’anarchie, cette mêlée insensée qui ne dura pas moins de huit cents ans, au cours desquels, les grandes migrations, les invasions se succédant sans cesse, la civilisation faillit périr, tandis que la population du globe tombait à moins de cinq cent millions d’habitants qui, non contents de se débattre avec les difficultés d’un nouveau genre d’existence, continuèrent par entraînement, par vitesse acquise si je puis dire, à se déchirer entre eux. La fin de ce temps d’exodes, de luttes titaniques, où disparurent races, coutumes, religions, où, comme dans un creuset, devait être malaxée et formée l’humanité de l’avenir, la fin de ce temps peut être marquée avec assez de vraisemblance en l’an 2815 par la constitution des États-Unis d’Afrique ayant pour capitale Tombouctou… »

À ces mots, l’amphithéâtre éclata en applaudissements. Un des élèves agita un mouchoir de soie reproduisant le pavillon des États : un globe sur fond de sable, surchargé de quarante-deux dromadaires, animaux héraldiques, symbolisant chacun des états. Le professeur sourit devant ces manifestations d’un patriotisme devenu sans objet puisqu’il n’avait plus de rivaux, et après avoir croqué une pastille, il reprit :

— « Au cours du second trimestre, nous étudierons le développement du nouvel État. De la confusion de l’époque précédente où peuples et races avaient mêlé leurs sangs, – dans tous les sens de l’expression, – il ne subsistait plus qu’une humanité ethniquement homogène, constituée par une seule race parlant approximativement une seule langue, ce qui devait faciliter la tâche des organisateurs. Il fallut cependant près d’un millénaire avant qu’une lente adaptation des organismes au nouveau milieu permît la constitution de l’homme nouveau et la reprise du développement démographique de l’espèce. La disparition des anciennes religions, en particulier la disparition du christianisme, religion caractéristique de l’époque quaternaire, sur la fin de laquelle j’ai, le premier, attiré l’attention dans mon ouvrage : Les variations idéologiques dans leur rapport avec l’évolution, au cours des débuts de l’ère quinquennaire, laissait le champ libre au développement d’une conception rationnelle et scientifique de la vie, et ce fut comme la planche de salut de l’humanité.

« L’époque qui suivit, qu’on a pu appeler époque troglodyte, compte aujourd’hui quatre cents ans de succès ininterrompu. C’est au président Mac Adam 3540-3622 qu’est due la première impulsion donnée à l’évolution des États-Unis d’Afrique, devenus entre temps États-Unis d’Afrique et du Monde, dans le sens troglodyte qui devait se montrer si fécond. À partir de l’an 3600, la civilisation s’enfonce dans les profondeurs du sol. Puisque le soleil ne veut plus, ne peut plus revenir au temps de ses anciennes splendeurs, les hommes iront chercher la chaleur nécessaire à l’épanouissement de leur activité, en se rapprochant du centre de leur planète. Les villes disparaissent sous terre. Tombouctou, capitale du globe, s’étend aujourd’hui à huit cents mètres de profondeur, et la philologie n’a pas été sans remarquer la présence prophétique du radical « tombe » dans le nom de la vieille ville. Mais dans cette tombe, si j’ose dire, l’humanité, loin de s’ensevelir, ressuscite. Là, sous nos pieds, se révèle à nous son nouveau visage plus actif et plus jeune que jamais. Une organisation toute scientifique de la vie a ramené dans le troupeau humain balayé par les cataclysmes, un ordre nouveau, si particulier, si complexe qu’il serait incompréhensible pour les représentants de l’humanité ancienne.

« Notre vie, la vie de l’humanité dans la situation présente est, si j’ose emprunter un mot aux vocabulaires disparus, un miracle perpétuel, un miracle de la science. Le temps n’est plus où l’homme pouvait se croire « homme » tout en se laissant vivre comme l’animal, comme le lézard au soleil. Il ne suffit plus d’attendre que le fruit mûrisse sous le ciel et tombe dans la bouche oisive. Il faut créer le fruit, il faut créer le soleil. De nos jours, notre vie est suspendue à une organisation si délicate qu’elle requiert une attention constante de l’esprit. Mais le cerveau a remporté la victoire, l’ordre règne, la courbe démographique de l’humanité remonte rapidement au delà du premier milliard, et la situation de l’espèce est si florissante qu’elle passe en éclat celle qu’en leur âge d’or ont connue les temps révolus.

« Je n’en veux d’autre exemple que ce fait qui, vous le comprendrez, me tient particulièrement à cœur : il est redevenu possible, pour une sélection d’individus dont vous êtes, de se consacrer à l’activité intellectuelle la plus désintéressée. Je veux dire : les cours d’histoire sont officiellement rouverts. Ici, sous l’antique ciel libre dont l’expérience a montré que les rayons étaient périodiquement nécessaires à l’entretien des facultés cérébrales de vos vieux professeurs, vous pouvez venir écouter les leçons d’un passé qui, si elles ne sont pas toujours applicables pour l’avenir, vous rappellent au moins la continuité de l’effort humain, et doivent vous inciter à regarder avec plus de confiance et d’énergie vers demain. »

Les applaudissements furent moins nourris qu’au début. La déférence témoignée par le vieux professeur envers l’état présent des choses avait un peu déçu l’auditoire. « Jadis, aux cours d’histoire, on se montrait plus frondeur, » marmonna Pat dont la maussaderie s’était lentement accrue pendant la conférence.

Les étudiants quittaient l’amphithéâtre. Pat manœuvra pour sortir seul, un des derniers. Il devait se faire inscrire à la bibliothèque. En ce jour de rentrée, il faudrait certainement y faire queue. Il décida d’y passer sans délai, et de profiter de sa mauvaise humeur pour en finir avec les choses désagréables.

Comme il poussait le tambour d’entrée, une main se posa sur son bras : c’était Évy de la Condamine.

— Pat Sandersen, le neveu du professeur Sandersen de Libreville ? demanda-t-elle avec une nuance d’intérêt.

Pat fit oui de la tête, interdit par la brusquerie de cette apparition et l’inattendu de la question.

— En ce cas, pardonnez-moi, reprit Évy. Tout à l’heure, je ne savais pas que vous étiez le neveu du professeur, mais puisqu’il est votre oncle, je suis heureuse de vous avoir plu.

Le tambour de la porte tourna. Évy avait disparu. Pat, ahuri, restait sur place, les yeux repris par la blondeur de cette chevelure, et l’oreille froissée par l’assurance de cette voix.

— Mon oncle, qu’est-ce que mon oncle peut bien… ? fit-il à part lui.

Son oncle, il y avait cinq ans qu’il ne l’avait pas vu, tant il avait horreur d’entrer dans un laboratoire, et le vieux ne quittait pas le sien… Puis, brusquement, il se mit en colère :

— Pourquoi se figure-t-elle qu’elle m’a plu ? dit-il à haute voix.

Il craignait maintenant de descendre à la bibliothèque où il pouvait être amené à la rencontrer encore. Chaque fois qu’un nouveau visage menaçait de prendre place dans ses pensées, il ressentait la même crainte vague. Sans parents, sans autres amitiés que celles de quelques camarades d’études, il s’était fait à sa solitude et la défendait jalousement. La solitude, c’était elle surtout qu’il allait chercher, au cours de ses fouilles, dans les grands espaces vierges du Nord. Là-haut, il n’y avait personne, sinon les effluves du passé que dégageait la surface de la vieille terre gelée. Et, perdu dans les glaces, à force d’évoquer les inoffensives figures qui jadis avaient peuplé la terre, il s’était composé un monde à lui, favorable à ses songes, un monde qu’il refusait de laisser envahir par les figures vivantes.

Il demeurait hésitant devant le portique d’entrée qui se teignait d’orange dans le soleil couchant. Le désert s’étendait autour du parc de la Faculté. Bien qu’il fût assez tard, la température se maintenait encore au-dessus de zéro. Au loin montait la brume violette annonciatrice de la nuit. Le crépuscule promettait d’être grandiose. Devant Pat s’ouvrait le chemin menant à l’aérodrome du nord, un aérodrome de marchandises, le plus petit, le moins fréquenté. Lentement il s’y engagea. Là, au moins, il serait un instant seul entre le ciel et la terre, et il assisterait à l’arrivée des avions venant du pays de Cléopâtre ; il toucherait le givre de leurs ailes et les patins d’atterrissage qui avaient mordu la glace de la Méditerranée…

Quand il parvint sous le hall désert de l’aérodrome, les projecteurs s’allumaient pour éclairer le terrain. Il s’efforçait de songer à la reine de Saba, aux cités fabuleuses perdues dans l’océan des sables, aux caravanes du passé allant de mirages en mirages et balançant sur les dunes les baldaquins chargés d’aromates et de pierreries… Le fracas de sept avions gros porteurs qui viraient au-dessus du bâtiment pour atterrir dans le sens des pinceaux lumineux, interrompit ses efforts et sa rêverie. Quand le train fut posé, Pat constata qu’il n’éprouvait aucun plaisir à contempler le givre du pays de Cléopâtre. Décidément, sa pensée était ailleurs. Il bougonna rageusement : « D’abord, qu’une fille avec une voix comme celle-là, me plaise, ça jamais ! »

Et il restait tout bête au milieu des ballots de fourrures fraîchement débarqués auxquels il ressemblait comme un frère.

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