17 juin

Ce matin, alors que j’étais assis sur le bord de mon lit à me mettre martel en tête, j’entendis claquer des fouets au-dehors et résonner des sabots de chevaux sur le sentier rocailleux qui mène à la cour du château. Le cœur battant de joie, je me précipitai à la fenêtre et je vis deux grandes charrettes qui entraient dans la cour, l’une et l’autre tirées par huit chevaux robustes et menées par un Slovaque en costume national, sans oublier la peau de mouton, et pourtant la longue hache. Faisant aussitôt demi-tour, je courus vers la porte dans l’intention de descendre et de tenter de les rejoindre près de l’entrée principale, car, me disais-je, on avait dû leur ouvrir de ce côté. Et, de nouveau un choc : de l’extérieur, on avait fermé ma porte à clef !

Je retournai à la fenêtre et criai. Tous levèrent la tête et regardèrent, stupéfaits et me montrant du doigt. Mais, à ce moment, arriva le chef des tziganes ; voyant que l’attention générale se portait sur ma fenêtre, il lança je ne sais quel mot qui les fit tous éclater de rire. Dès lors, tout effort de ma part fut vain, et tout appel à la pitié ; personne ne leva même plus les yeux vers moi. Les charrettes amenaient des grandes caisses carrées dont les poignées étaient faites de cordes épaisses. À voir la facilité avec laquelle les Slovaques les maniaient et à entendre le bruit qu’elles faisaient quand ils les laissaient tomber sur le pavé, on devinait qu’elles étaient vides. Lorsque toutes furent mises en tas dans un coin de la cour, les tziganes donnèrent aux Slovaques quelque argent, et ceux-ci, après avoir craché sur les pièces afin de s’attirer la chance, retournèrent d’un pas lent près de leurs chevaux. À mesure qu’ils s’éloignaient, j’entendais de plus en plus faiblement les claquements de leurs fouets.

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