NOTE 21.

M. Froment rapporte le fait suivant dans son écrit déjà cité :

« Dans ces circonstances, les princes projetaient de former dans l’intérieur du royaume, aussitôt qu’ils le pourraient, des légions de tous les fidèles sujets du roi, pour s’en servir jusqu’au moment où les troupes de ligne seraient entièrement réorganisées. Désireux d’être à la tête des royalistes que j’avais dirigés et commandés en 1789 et 1790, j’écrivis à Monsieur, comte d’Artois, pour supplier son altesse royale de m’accorder un brevet de colonel-commandant, conçu de manière que tout royaliste qui, comme moi, réunirait sous ses ordres un nombre suffisant de vrais citoyens pour former une légion, pût se flatter d’obtenir la même faveur. Monsieur, comte d’Artois, applaudit à mon idée, et accueillit favorablement ma demande ; mais les membres du conseil ne furent pas de son avis : ils trouvaient si étrange qu’un bourgeois prétendît à un brevet militaire, que l’un d’eux me dit avec humeur : Pourquoi ne demandez-vous pas un évêché ? Je ne répondis à l’observateur que par des éclats de rire qui déconcertèrent un peu sa gravité. Cependant la question fut débattue de nouveau chez M. de Flaschslanden ; les délibérans furent d’avis de qualifier ces nouveaux corps de légions bourgeoises. Je leur observai : « Que sous cette dénomination ils recréeraient simplement les gardes nationales ; que les princes ne pourraient les faire marcher partout où besoin serait, parce qu’elles prétendraient n’être tenues de défendre que leurs propres foyers ; qu’il était à craindre que les factieux ne parvinssent à les mettre aux prises avec les troupes de ligne ; qu’avec de vains mots ils avaient armé le peuple contre les dépositaires de l’autorité publique ; qu’il serait donc plus politique de suivre leur exemple, et de donner à ces nouveaux corps la dénomination de milices royales ; que… »

« M. l’évêque d’Arras m’interrompant brusquement, me dit : « Non, non, monsieur, il faut qu’il y ait du bourgeois dans votre brevet ; » et le baron de Flachslanden, qui le rédigea, y mit du bourgeois. »

(Recueil de divers écrits relatifs à la révolution, page 62.)

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